Le skipper handicapé Damien Seguin au départ de sa deuxième Route du Rhum

Publié le 31 octobre 2014 par Valérie Di Chiappari
CLASS 40 DES PIEDS ET DES MAINS - DAMIEN SEGUIN

Ce dimanche 2 novembre, 91 marins prendront le départ de la 10e Route du Rhum à Saint-Malo. Parmi eux : Damien Seguin. Le skipper, né sans main gauche, était le porte-drapeau de la délégation française aux Jeux paralympiques de Londres. Il s’apprête à passer trois semaines en mer et compte bien rivaliser avec les meilleurs dans cette transatlantique.

CLASS 40 DES PIEDS ET DES MAINS - DAMIEN SEGUIN

Comment vous préparez-vous pour cette traversée de l’Atlantique en solitaire ?
Pendant l’année, j’alterne courses de qualification pour les Jeux paralympiques et préparation pour la course au large. Les dernières semaines ont été consacrées à des sorties quotidiennes avec le bateau, en solo ou lors de stages collectifs. Ces navigations permettent de se familiariser avec le bateau et de retrouver ses sensations en solitaire, dormir par tranche de vingt minutes et décortiquer les manœuvres.

Sur quel bateau prendrez-vous le départ ?
Sur un Class 40 de plus de douze mètres de long. C’est un monocoque rapide à toutes les allures qui a la particularité d’avoir un rapport poids puissance très élevé.

Vous allez courir votre deuxième Route du Rhum. Comment vous êtes-vous servi de l’expérience acquise en 2010 ?
En 2010, je découvrais la transatlantique en solitaire. Cette expérience m’a servi à améliorer le bateau dans ses moindres détails. La cellule de vie est différente, tout a été conçu pour être à portée de main.

La transatlantique a aussi un goût particulier pour vous ?
Oui, j’ai assisté à l’arrivée de la course en 1990, en Guadeloupe. J’avais 10 ans, mon envie de naviguer est sans doute née ici devant ses grands marins.

CLASS 40 DES PIEDS ET DES MAINS - DAMIEN SEGUINEn voile, les mains se trouvent sans cesse sollicitées, naviguez-vous avec du matériel adapté ?
J’ai la chance d’avoir ce handicap depuis la naissance, je me suis toujours adapté au quotidien puis sur l’eau. Je ne navigue pas comme quelqu’un qui a ses deux mains. Mais c’est moi qui me suis adapté au bateau et non l’inverse. Je suis aussi un compétiteur avant tout et je ne veux pas qu’on me reproche d’avoir un avantage technologique sur mes concurrents.

Qu’est-ce qui fait le sel de votre discipline ?
La voile est l’un des rares sports où la performance physique n’est pas forcément en lien direct avec le résultat final. Il faut évidemment être en excellente condition mais la tactique rentre aussi en ligne de compte. Des personnes handicapées comme moi peuvent être aussi performantes que les valides.

La voile n’a pas qu’une dimension sportive pour vous ?
En 2004, après ma médaille d’or aux JO d’Athènes, j’ai créé l’association Des pieds et des mains pour faire découvrir la voile aux personnes handicapées. Elle était jusque-là assez inaccessible pour eux. L’association développe cet accès et fait voler en éclats les préjugés en montrant que l’on peut faire naviguer quasiment tout le monde. Elle favorise l’intégration, les personnes en fauteuil roulant sont souvent sorties du fauteuil pour aller sur l’eau. Ça décloisonne les choses et ça correspond aussi aux valeurs véhiculées par la voile.

Quels sont vos objectifs sur cette Route du Rhum et à plus long terme ?
Une place dans les cinq premiers et même un podium sont envisageables si tout se passe bien. Je possède les capacités physiques et techniques. En course au large, le Vendée Globe représente pour moi une finalité. Avec les valeurs défendues par l’association, ça serait tout un symbole d’être le premier marin handicapé à boucler ce tour du monde en solitaire. Au vu de la dimension de l’évènement, l’écho serait énorme. Le défi sportif est envisageable, reste à trouver les partenaires pour s’engager dans l’aventure. Propos recueillis par Céline Diais – Photos Jean-Marie Liot

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