Handicap et guerre 39-45 : les 45 000 internés morts de faim sortent de l’oubli

Publié le 12 décembre 2016 par Franck Seuret
François Hollande a déposé une grande gerbe de fleurs devant la plaque scellée dans le sol du Parvis des Droits de l'Homme le samedi 10 décembre. © Présidence de la République

François Hollande a rendu hommage aux personnes handicapées, décédées durant la Seconde Guerre mondiale, samedi 10 décembre. La cérémonie a notamment été marquée par le témoignage de la petite-nièce d’un des 45 000 internés morts de faim dans les hôpitaux psychiatriques.

Sa voix est posée. Le débit, régulier. Mais l’émotion, bien que maîtrisée, est perceptible. « Ma grand-tante Yvonne faisait partie de ces malheureuses victimes », lit Christine Goirand-Fadhlaoui. Elle se tient debout, derrière le pupitre, sur la scène dressée dans une des salles du Musée de l’Homme, à Paris. Ce samedi 10 décembre, plus de 300 personnes sont rassemblées, à l’invitation de l’Élysée, pour rendre hommages aux victimes handicapées ou malades de la Seconde Guerre mondiale.

« La famille l’a considérée comme morte. »

« Elle a été internée à l’âge de 30 ans à l’asile de Clermont-de-l’Oise. C’était en 1938, et d’après ce que je sais, après son internement, la famille l’a considérée comme morte », poursuit Christine Goirand-Fadhloui. Elle marque une pause, semble reprendre son souffle  : « Abandonnée à son triste sort, elle est finalement morte de faim à 36 ans, en septembre 1944. »

45 000 victimes « gravement négligées »

Quelques minutes plus tôt, François Hollande avait déposé une grande gerbe de fleurs devant la plaque scellée dans le sol du Parvis des Droits de l’homme, à Paris. « Ici, le 10 décembre 2016, la Nation a rendu hommage aux 300 000 victimes civiles de la Seconde Guerre mondiale en France. 45 000 d’entre elles, fragilisées par la maladie mentale ou le handicap et gravement négligées, sont mortes de dénutrition dans les établissements qui les accueillaient. Leur mémoire nous appelle à construire une société toujours plus respectueuse des droits humains, qui veille fraternellement sur chacun des siens. »

François Hollande : « La société a des devoirs a l'égard des plus vulnérables. »
François Hollande : « La société a des devoirs à l’égard des plus vulnérables. » Photo Franck Seuret

Plaidoyer pour le modèle social français

Après l’intervention de Christine Goirand-Fadhlou, le président de la République prend la parole. Le moment est solennel. François Hollande prononce un plaidoyer pour le modèle social français.

« La société a des devoirs a l’égard des plus vulnérables. Elle leur doit une protection, un accompagnement, des prestations. (…) En 70 ans, d’immenses progrès ont été accomplis. (…) Notre modèle social, c’est ce qui unit les individus, quelle que soit leur position. »

« Devoir de vigilance. »

Mais rappeler l’histoire des internés morts de faim invite aussi à questionner l’acceptation des vulnérabilités dans la France d’aujourd’hui, les hiérarchisations persistantes des vies, les discriminations dont sont encore victimes les personnes en situation de handicap.

« L’hommage que nous rendons aujourd’hui aux personnes handicapées, aux malades abandonnés sous l’Occupation, nous rappelle à notre premier devoir, insiste François Hollande : notre devoir de vigilance face aux souffrances qui ne se voient pas, aux victimes que l’on n’entend pas. » L’Histoire, comme leçon pour le présent.  Franck Seuret

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