Logements accessibles : pas de quotas dans la loi mais des quotas quand même ?

Publié le 9 avril 2018 par Franck Seuret
Le Conseil d’État est saisi des projets de loi avant leur passage au Parlement.

Pour le Conseil d’État, le Parlement n’a pas le droit de fixer un pourcentage de logements accessibles, comme le prévoit la mouture actuelle du projet de loi Élan. En revanche, le gouvernement peut déterminer un pourcentage par décret ou arrêté une fois qu’une version corrigée de la loi aura été adoptée. L’avis rendu par la plus haute juridiction administrative en France ne l’empêchera donc pas de mener son projet à terme.

Le gouvernement va certainement devoir revoir son projet de loi Élan sur le logement. Sauf à aller contre l’avis du Conseil d’État, rendu public le 5 avril. Ce dernier vient de le mettre en garde sur les quotas qu’il souhaite instaurer. Le texte, présenté le 4 avril en Conseil des ministres pour être débattu au Parlement, prévoit que, désormais, seuls 10 % des appartements dans des immeubles neufs soient accessibles aux personnes en situation de handicap. Les autres devront simplement être « évolutifs ».

« Pas possible au niveau législatif »

Or, « il ne paraît pas possible de fixer, au niveau législatif, les conditions précises d’application de la mesure visant à la production, au sein des bâtiments d’habitation collectifs, d’un dixième de logements accessibles (…) tandis que les autres logements seraient “évolutifs”, sauf à empiéter manifestement sur la compétence du pouvoir réglementaire », avertit la plus haute juridiction administrative en France.

En clair, le législateur n’a pas le droit de déterminer un pourcentage de logements accessibles. Mais cela ne signifie pas pour autant que la partie est définitivement gagnée pour les associations opposées à cette mesure. Si la loi (« le niveau législatif » comme indiqué par le Conseil d’État) ne peut pas fixer de quota, un décret ou un arrêté (« le pouvoir réglementaire »), lui, peut le faire.

Les quotas pourront être introduits dans le Code de la construction.

Le précédent des logements temporaires et saisonniers

C’est d’ailleurs ce qui s’est passé pour les logements destinés à l’occupation temporaire ou saisonnière. La loi précise simplement que, pour ces bâtiments, « un décret (…) fixe les exigences relatives à l’accessibilité ». Le décret du 14 mars 2014 stipule que « le ministre chargé de la construction détermine par arrêté (…) les modalités de calcul du pourcentage de logements » accessibles. Et l’arrêté pris le même jour précise que ce pourcentage « ne saurait être inférieur à 5 % arrondi à l’unité supérieure et avec un minimum d’un logement. Pour les résidences de tourisme, ce pourcentage est porté à 10 %. »

C’est le même type de dispositif juridique qui pourrait prévaloir pour les logements dans les immeubles neufs. À moins que le gouvernement décide finalement de renoncer à son projet de quota, qui fait l’unanimité contre lui dans les associations de personnes handicapées.

Contraire à la convention des Nations unies

Selon elles, l’instauration de quotas serait discriminatoire car elle limiterait les possibilités de vivre où les personnes handicapées le souhaitent. Une mesure contraire à la Convention des Nations unies pour les droits des personnes handicapées.

Son article 19 précise que les personnes en situation de handicap doivent avoir « la possibilité de choisir, sur la base de l’égalité avec les autres, leur lieu de résidence ». Voilà au moins qui est clair. Franck Seuret

L’accessibilité inintelligible

Comme le précise la constitution, le Conseil d’État est saisi des projets de loi avant leur passage en Conseil des ministres puis au Parlement. Il rend son avis que le gouvernement est libre de suivre ou pas.

Dans celui sur la loi Élan, la plus haute juridiction administrative française souligne également la nécessité d’une clarification des dispositions du Code de la construction et de l’habitation relative aux personnes handicapées ou à mobilité réduite. « Sa rédaction actuelle ne s’avère pas satisfaisante, au regard de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi », précise-t-elle. Dit autrement, c’est le bazar.

Comment 3 commentaires

Bonjour , La loi n est pas respecté, cela fait 1 an que j ai fait une demande au office des HLM ( 2 à Perpignan , 1 à la roche sur yon ) et j ai écrit à 30 Marie différent et même au Ministe du logement, Pour entendre toujours là même réponse ” il n’y a rien de libre ” et ce après une amputation de la jambe , et que mon logement à été reconnu non conforme à mon handicap , car ma salle de bain n est pas adapter . Alors que l’on me trouve les 10% de personne handicapée qui occupe c est ” logement “. Alors pour avoir une office des HLM prévu à notre égard c est mission impossible , et par particulier ou par agence on a pas assez de revenu. A qui nous ADRSSER ?

Etes-vous certain de votre lecture de l’avis du Conseil d’Etat sur les logements évolutifs ?

Celui-ci n’interdit pas d’introduire au niveau législatif le quota de 10 %.

Sa remarque porte sur les “conditions précises d’application”, c’est-à-dire que la définition fonctionnelle de logements évolutifs (entrée, salon-séjour, couloirs et sanitaires accessibles, comme l’a affirmé Julien Denormandie) et encore moins les normes techniques d’accessibilité ne peuvent être écrites dans la loi.
En revanche, il reconnait qu’il est impératif de dire dans la loi qu’un “logement est dit évolutif lorsqu’il peut être rendu accessible à l’issue de travaux simples” pour que le citoyen comprenne ce que veut dire “évolutif”.

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