« Sous prétexte de corps “abîmés”, les personnes handicapées auraient-elles moins de droits que les autres ? »

Publié le 3 juin 2014 par Valérie Di Chiappari

Lauréat 2014 du concours SOPHOT.com de la photographie humaniste et sociale, Jérôme Deya expose son travail photographique “À mon corps dérangeant” du 4 juin au 19 juillet à la galerie Fait & Cause à Paris. Collaborateur de Faire Face, il explique ce qui l’a poussé à s’intéresser à la vie affective et sexuelle des personnes handicapées et à mettre en images un « hymne au corps différent ».

Faire Face : A-t-il été simple de convaincre les personnes de vous laisser pénétrer dans leur intimité ?

Jérôme Deya : C’est un long travail de mise en confiance qui a pris plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Mais une fois que j’ai expliqué clairement ce que je cherchais à montrer et l’utilisation que j’allais faire de mes photos, les personnes m’ont ouvert largement leur porte. Les prises de vue ont été réalisées sur une journée.

FF : Qu’avez-vous voulu donner à voir en abordant ce sujet encore largement tabou en France ?

J.D. : Sous prétexte de corps “abîmés”, les personnes handicapées auraient-elles moins de droits que les autres ? Leur accès à la sexualité serait-il secondaire ? Aurions-nous tendance à oublier qu’il y a une personne derrière un handicap ? J’ai conçu ce travail comme un hymne au corps de l’autre “différent”, ce corps que l’on évite ou que l’on cache et qui contrarie. Ce corps tordu a le droit d’exprimer sa sensualité et ses émotions.

 

Jerome Deya by Cyril Bitton-LRFF : Que répondez-vous à ceux qui pourraient être choqués par votre travail ?

J.D. : Pourquoi, au fond, suis-je si troublé par cette différence ? N’est-ce pas à moi de m’adapter ? Faire le premier pas, passer outre les modèles établis et les préceptes “vertueux” : voilà le chemin suivi, sans hésitation, par les personnes photographiées. Elles osent s’afficher pour défendre une cause qui paraît être la leur alors qu’elle est celle de tous.

FF : La galerie Fait & Cause n’est pas accessible aux fauteuils roulants. Pourquoi ce choix ?

J.D. : C’est le lieu d’exposition traditionnel des lauréats du concours SOPHOT.com. La galerie se situe dans un immeuble classé du XVIIe siècle dans lequel les travaux ne peuvent pas être réalisés en dépit de la volonté des organisateurs. Pour autant, rien n’empêche une personne en fauteuil manuel d’y pénétrer si un accompagnateur peut l’aider à monter trois marches.

Aujourd’hui, 3 juin, jour du vernissage, la galerie ouvrira ses portes dès 17 heures. Je serai présent. L’occasion de visiter tranquillement l’exposition avant l’ouverture. Par ailleurs, je suis à la recherche d’un autre lieu totalement accessible afin de permettre un accès à tous sans restriction.

Propos recueillis par Claudine Colozzi – Photos Jérôme Deya et portrait de Jérôme Deya crédit Cyril Bitton

Galerie Fait & Cause – 58, rue Quincampoix – 75004 Paris – Du mardi au samedi de 14h à 19h. Vernissage le 3 juin à 17h. Tél. : 01 42 74 26 36 – contact@sophot.com

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