Jeux paralympiques : pas tous égaux sur la ligne de départ

Publié le 8 septembre 2016 par Franck Seuret
Dans les épreuves de sprint avec lame ou fauteuil, seuls les athlètes d'une petite dizaine de pays peuvent rivaliser. © CSPF 2012/B-Loyseau

Dans certaines épreuves des Jeux paralympiques, être compétitif implique d’être équipé de prothèses ou de fauteuils très coûteux. Les athlètes des pays moins riches se tournent vers des disciplines où l’importance des aides techniques s’avère moindre.

Tous les sprinteurs ne luttent pas à lames égales… À 10 000 € la prothèse high-tech, de nombreux athlètes amputés n’ont pas les moyens d’entrer dans la course. Ceux des pays les moins développés, notamment.

Aux Jeux paralympiques de Londres, par exemple, les finales des 100 m hommes et femmes, catégorie T 42 (amputation d’une jambe au-dessus du genou ou handicap comparable) ne comptaient qu’un seul représentant d’un pays ne faisant pas partie du top 20 des nations les plus riches (une polonaise).

L'équipe d’athlétisme des Etats-Unis concourt avec des fauteuils conçus par BMW.
Les athlètes américains sont équipés de fauteuil extrêmement aérodynamiques et légers. © DR

Des fauteuils designés par BMW pour les États-Unis

Pour pratiquer une activité sportive, de nombreux athlètes handisport ont, en effet, besoin d’une aide technique – lame, fauteuil roulant… – ou d’un matériel spécifique (handbike, par exemple). Selon leurs moyens financiers ou ceux de leur fédération, les compétiteurs ne disposeront pas de matériel équivalent.

L’équipe d’athlétisme des États-Unis concourra ainsi à Rio avec des fauteuils conçus spécialement par les designers et ingénieurs de BMW, le partenaire du Comité olympique américain.

Environnement culturel, économique et social déterminant

Le sport de haut niveau, qu’il soit pratiqué par des athlètes valides ou en situation de handicap, n’est pas un terrain de jeu aux règles universelles. Les capacités de ces hommes et des ces femmes sont certes importantes mais leur environnement culturel, économique et social constitue également un élément déterminant.

Tous les pays ne disposent pas d’équipements sportifs, en nombre et qualité équivalents. Certains athlètes peuvent s’entraîner à temps plein quand d’autres doivent concilier vie professionnelle et entraînements, etc. Aux Jeux olympiques, neuf à dix pays trustent donc la moitié des médailles et quinze, les deux-tiers d’entre elles. Les autres se partagent les miettes.

Aux Jeux paralympiques 2012, sept pays se sont partagé la moitié des médailles

À ce facteur de concurrence extra-sportive s’en ajoute donc un autre dans le handisport : la possibilité de pouvoir bénéficier d’aides techniques performantes. Les Jeux paralympiques sont-ils alors plus inégalitaires que les Jeux olympiques ? Oui mais guère plus, montre notre analyse statistique des résultats des trois dernières éditions.

Le nombre de nations se partageant 50 % des médailles est le même (10) aux Jeux olympiques et paralympiques de 2004 et 2008. En 2012, la concentration est supérieure aux JP (7) qu’aux JO (9). La tendance reste sensiblement la même pour le seuil de 66 % des médailles : en 2008 et 2012, le nombre de pays ayant trusté deux podiums sur trois s’avère plus réduit aux JP qu’aux JO (respectivement 12 et 13 contre 16).

nombre-de-pays-se-partageant-medailles-jeux

Des finales bien plus ouvertes au lancer qu’au sprint

« Dans les pays qui n’ont pas les moyens de financer des aides techniques performantes, les athlètes se tournent vers des disciplines où l’importance du matériel est beaucoup moindre, voire neutre, comme les lancers, par exemple, ou encore l’haltérophilie », explique Julien Héricourt, le directeur sportif de l’athlétisme à la Fédération française handisport.

À Londres, les finales du lancer de disque en fauteuil (F51-53) rassemblaient des Algériens, Lettons, Tunisiens, Jamaïcains, Indiens, Grecs, Mexicains… Cette spécialisation par défaut contribue à rééquilibrer les chances de médailles des nations n’ayant pas la puissance économique des pays les plus développés.

Développer l’aide internationale

Certes, le Comité paralympique international (IPC) mène des programmes d’aide à l’essor du handisport dans les pays en voie de développement. Notamment via sa Fondation Agitos, créée en 2012. « Mais il faudrait intensifier cet effort, plaide Julien Héricourt. C’est une question de volonté politique. Cela serait bénéfique à tous les athlètes car cela permettrait de faire éclore de nouveaux talents et donc d’intensifier la compétition. »

Aujourd’hui, dans les épreuves de sprint avec lame ou fauteuil, seuls les athlètes d’une petite dizaine de pays peuvent en effet rivaliser. « Et puis, ajoute Julien Héricourt, le mouvement paralympique a vocation à être le plus universel possible. » Franck Seuret

Comment 2 commentaires

Article très instructif: tout en sachant que l’environnement global d’un pays (économie, politiques sociales & sportives, histoire…)contribue au développement d’un sport quel qu’il soit, je n’aurais jamais trop réfléchi sur l’impact du matériel plus ou moins sophistiqué, possible ou non suivant cet environnement du pays. Au fond, au risque de choquer, presque une forme de dopage, visible et pas pour les mêmes raisons. Tiens, je ne lis plus rien sur les pays absents, n’ayant pas reçu l’argent du comité olympique pour les voyages e.a. de leurs équipes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site est protégé par reCAPTCHA et la Politique de Confidentialité de Google et l'application des Conditions d'Utilisation.