Prise en charge médicale des enfants handicapés : imbroglio dans la Sarthe

Publié le 8 janvier 2018 par Sophie Massieu
« Notre équipe pluridisciplinaire de professionnels compte bien un orthophoniste, précise Martine Guillier, la directrice du Camsp du Mans. Mais nous ne pouvons assurer le suivi que de 50 enfants. Un quart environ de ceux ayant besoin de séances d'orthophonie. »

Fin décembre, les parents du Centre d’accueil médico-social précoce (Camsp) du Mans (Sarthe) lancent une pétition, “pour l’accès aux soins des enfants en situation de handicap”. Ils dénoncent en effet la décision de l’Agence régionale de santé de ne plus rembourser à compter du 1er janvier les soins dispensés à certains enfants en médecine libérale. L’ARS dément. Le point sur une situation plus complexe qu’il n’y paraît.

À lire le texte de la pétition lancée fin décembre par les parents d’enfants pris en charge au Centre médico-social précoce du Mans (Camsp), la situation semble simple. Depuis le 1er janvier 2018, les enfants ayant besoin de soins en médecine libérale, notamment en orthophonie et kinésithérapie, en plus du suivi par le Camsp, ne sont plus pris en charge par la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). L’Agence régionale de santé Pays-de-la-Loire en a décidé ainsi.

C’est mon orthophoniste qui m’en a parlé, explique Alann Renault, à l’origine de la pétition. Puisque les soins ne seront plus remboursés, certains orthophonistes ont déjà prévenu les familles qu’ils ne recevraient plus les enfants concernés !

Sur les 390 enfants accueillis chaque année par le Camsp, près de la moitié vont chez des orthophonistes du secteur libéral. “Notre équipe pluridisciplinaire de professionnels compte bien un orthophoniste, précise Martine Guillier, sa directrice. Mais nous ne pouvons assurer le suivi que de 50 enfants. Un quart environ de ceux ayant besoin de séances d’orthophonie.

Faute de moyens, c’est l’impasse

Dès lors, si la CPAM ne rembourse plus ces soins, ce seront autant d’enfants mis en difficulté. Le Camsp, supposé prendre le relais, n’en a pas les moyens. “L’ARS nous finance à 80 % , la CPAM à 20 %, indique Martine Guillier. Légalement, on devrait pouvoir financer les prises en charge des soins en médecine libérale. Mais notre dotation ne nous le permet pas.” C’est l’impasse.

L’ARS se défend d’être à l’origine de cette situation. Pour autant, elle veut faire appliquer le règlement : le remboursement et la prescription par le Camsp. Son objectif : mettre en place des conventions avec les orthophonistes. Les soins en médecine libérale pourront dès lors continuer d’être remboursés. Mais à une double condition : la spécificité de la prise en charge et sa grande fréquence doivent être reconnues par le médecin du Camsp, le seul habilité à les prescrire.

Nous ne pouvons pas continuer à voir des enfants à la fois suivis en Camsp et en médecine libérale sur ordonnance d’un médecin traitant sans qu’il y ait de coordination entre ces deux prises en charge“, explique Patricia Salomon, responsable du département accompagnement médico-social.

Négociation ardue

L’ARS se donne donc six mois pour mettre en œuvre ces conventions. Mais elle promet qu’il n’y aura pas de rupture de prise en charge en 2018. Mais la négociation s’annonce ardue. Les orthophonistes ne voient sans doute pas tous d’un bon œil ces conventions. L’ARS voudra appliquer des règles, les Camsp devront défendre leurs moyens d’action.

Surcroît d’activité avéré

Martine Guillier s’y prépare. Le levier du Camsp dans la négociation avec l’ARS sera le “surcroît d’activité“. S’il parvient à le faire reconnaître, il sera plus facile d’obtenir des remboursements de soins en médecine libérale. Martine Guillier est confiante : certains enfants attendraient trois ou quatre ans des soins en orthophonie s’ils ne faisaient pas appel à la médecine libérale. Le surcroît d’activité lui semble donc avéré.

De son côté, l’ARS semble prête à prendre cette donnée en considération. Et les parents, eux, restent mobilisés en attendant une solution pérenne. Les volontés affichées semblent ainsi toutes aller dans le sens de la prise en charge des enfants au plus près de leurs besoins. De quoi faire espérer une issue. Sophie Massieu

Comment 3 commentaires

N’oubliez pas, au cours de vos débat, qu’au milieu de cette guerre de conventions, de procédures, il y a des enfants. Des enfants qui souffrent déjà suffisamment.
De leur point de vue, ainsi que de celui de leurs parents, il s’agit, une fois de plus, d’être traité différemment.

Sinon vous engagez d’autres orthophonistes au CAMSP… ?
Ah mais oui, j’oubliais, pour cela il faudrait proposer mieux qu’un salaire à peine plus élevé qu’un SMIC à des orthophonistes diplômés BAC+5.

Ces enfants on besoin de ce suivi pour leur avenir, la relation avec l’ensemble de la société maintenant et plus tard. C’est essentiel pour tous, il ne doit pas avoir de différence. Le pire c’est l’indifférence.

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