Santé : mais où sont passés les crédits maladies rares ?

Publié le 16 mars 2018 par Adélaïde Robert-Géraudel
Pour le Collectif des associations des ataxies et des paraplégies spastiques héréditaires, les directions hospitalières ont utilisé ces crédits pour combler leur déficit.

Des financements attribués aux filières de santé maladies rares par la Direction générale de l’offre de soins ne sont toujours pas arrivés à leurs destinataires. Un dysfonctionnement qui interroge et agace.

Le 25 octobre 2016, la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) lançait un appel à projets destiné à actualiser la liste des Centres de référence maladies rares (CRMR). Un an plus tard, la liste des réseaux des centres de référence labellisés est parue au Bulletin officiel. Au total, 23 filières s’articulent autour de 187 centres de référence et 1 800 centres de compétence. Pour les faire fonctionner, 45 millions d’euros leur ont été alloués.

Mais certains centres n’en ont toujours pas vu la couleur. Pourtant, la DGOS a bien effectué les versements en novembre 2017 aux directions hospitalières dont ils dépendent. D’où la question : où sont passés les crédits maladies rares ?

Des crédits détournés pour combler le déficit des CHU ?

Pour le Collectif des associations des ataxies et des paraplégies spastiques héréditaires, les directions hospitalières ont utilisé ces crédits pour combler leur déficit. C’est ce dont ils les accusent dans un  courrier du 18 janvier 2018 adressé à la ministre des Solidarités et de la santé, Agnès Buzyn.

Les filières de santé maladies rares et des associations de malades ont elles aussi dénoncé, dans un communiqué de presse diffusé fin février à l’occasion de la journée internationale des maladies rares,  la “confiscation des crédits maladies rares par certaines directions hospitalières“.

Elles les accusent d’avoir “clairement détourné” une part importante des financements fléchés “à d’autres fins que les maladies rares et ce de manière totalement arbitraire“. Ambiance.

40 % des centres seraient concernés

Cécile Courrèges, la directrice de la DGOS, a adressé aux Filières une réponse, à laquelle faire-face.fr n’a pas pu avoir directement accès. Mais elle a été jugée très “langue de bois”, selon une porte-parole des Filières de santé maladies rares.

Lors d’une séance publique au Sénat le 13 mars 2018, la sénatrice Évelyne Renaud-Garabedian est donc revenue à la charge en interrogeant Agnès Buzyn. Celle-ci s’est dite « pleinement mobilisée sur ces questions budgétaires pour que ces ressources allouées aboutissent évidemment dans les centres labellisés ». Elle a cependant considérablement minimiser la question.

Selon elle, seul « un petit nombre de centres » serait en effet concerné. Or, du côté des Filières, l’estimation diffère. Si seul un petit nombre d’hôpitaux serait en cause, ce sont 40 % des centres qui seraient concernés.

Dysfonctionnement en plein lancement du 3e plan Maladies rares

Sans moyens, ces centres ne peuvent bien sûr pas mettre en place les actions de coordination, de soins, d’expertise et de recours, de recherche et d’enseignement pour les personnes atteintes de maladies rares. Or bien que rares, ces maladies, au total, concernent trois millions de personnes en France dont de nombreux enfants.

Un dysfonctionnement qui fait tache à l’heure où le gouvernement lance le troisième plan Maladies rares. D’ailleurs, l’un de ses axes prioritaires prévoit de renforcer le rôle des Filières…

Du côté des associations, l’inquiétude grimpe. Actives sur le front de l’aide à la recherche, elles craignent d’avoir bientôt à partir en quête des fonds manquants. « Il n’existe aucun traitement pour nos proches et nous sommes contraints de l’accepter, souligne Hubert Boeuf, président de Connaître les syndromes cérébelleux. Notre seul espoir et soutien reste la qualité des prises en charge pour améliorer leur quotidien. Nos principaux interlocuteurs pour la coordination et l’expertise de tous les centres accueillants les maladies rares sont les centres de références. Si ceux-ci n’ont plus les budgets leur permettant de poursuivre leurs actions, comment pourrons-nous tenir debout ? » Adélaïde Robert-Géraudel

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site est protégé par reCAPTCHA et la Politique de Confidentialité de Google et l'application des Conditions d'Utilisation.