“La sexualité n’est pas une maladie.”

Publié le 27 juin 2018 par Élise Descamps
Adhérent à APF France handicap et au Crédavis, le limousin Clément Chadeyron plaide pour une approche décomplexée et festive de la sexualité pour les personnes une situation de handicap.

Le Crédavis et Ladapt organisent du 28 au 30 juin le festival Ma sexualité n’est pas un handicap, au centre culturel le Centquatre, à Paris. Spectacles, conférences humoristiques, speed dating, espace prévention santé, espace sensuel… En amont, nous avons rencontré Clément Chadeyron, un adhérent du Crédavis, et bricoleur de sex toys adaptés, séduit par cet événement festif, qui replace la séduction et le plaisir au centre du débat.

Faire-face.fr : Vous êtes adhérent, depuis sa création en 2012, au Crédavis (Centre de recherche et d’études concernant le droit à la vie amoureuse et sexuelle). Cette association co-organise le festival “Ma sexualité n’est pas un handicap” avec L’Adapt. Qu’y cherchez-vous ?

Clément Chadeyron : Quand j’ai eu mon accident en 2009, devenant paraplégique, j’étais préoccupé, à 22 ans, par ce que je pourrais encore faire, sexuellement. Le sexologue du centre de rééducation m’a simplement dit d’essayer et de voir comment mon corps réagirait. J’en attendais beaucoup plus. Que l’on me parle du Viagra. Que l’on me fasse entendre des témoignages de personnes passées par là.

Je me suis alors intéressé à des associations ciblées sur cette question. Mais leur approche était trop politique pour moi ou trop axée sur l’assistance sexuelle, dont je n’avais pas besoin. J’ai été heureux de trouver dans le Crédavis une approche concrète, proposant des solutions variées en fonction des personnes. Le festival “Ma sexualité n’est pas un handicap” est enfin un événement festif. Avec plein d’ateliers et la possibilité de draguer. C’est quand-même l’essentiel !

On en a marre de ne parler qu’à des sexologues, comme si c’était une maladie ! Dans le même esprit, j’ai créé, avec d’autres, il y a six mois, le groupe Facebook Amour désir et handisexualité.

Séduire dans la vraie vie

F-f.fr. : Rupture après votre accident, sites de rencontres, relations amoureuses avec des femmes valides ou handicapées… Que retirez-vous de votre expérience ?

C. C : Quand j’ai eu mon accident, je sortais de mes études, j’avais un travail. J’avais aussi une copine depuis trois ans, avec qui je formais un couple fusionnel et envisageais de faire ma vie. Sexuellement, cela fonctionnait encore, mais notre couple n’a pas tenu, ce qui a été encore beaucoup plus dur que de perdre mes jambes.

J’ai mis beaucoup de temps avant d’oser m’inscrire sur un site de rencontres. Mais que j’annonce mon handicap au début, en cours de conversation, ou au dernier moment, cela ne marchait jamais. Ou seulement pour un soir. Sur les sites spécialisés entre handicapés, je n’ai quasiment été contacté que par des journalistes ou des étudiants enquêtant sur le sujet !

Sortir avec une autre personne handicapée n’est pas plus simple. La gestion du quotidien reste très lourdes. Et mine de rien, les appartements accessibles sont prévus pour que puisse tourner un fauteuil, pas deux. Finalement, le plus efficace est la vraie vie : le travail, les études, les associations… C’est là que l’on peut voir les mêmes personnes régulièrement, et se fier à son feeling.

Des sex toys adaptés

F-f.fr : Passionné de bricolage, vous adaptez des sex toys pour les personnes en situation de handicap qui vous le demandent. En quoi cela consiste-t-il ?

C.C : J’habitais auparavant dans les Yvelines, où j’avais monté, à APF France handicap, un groupe sur la sexualité. Nous avions présenté des sex toys à des personnes lourdement handicapées. Mais nous nous étions rendus compte qu’elles ne pouvaient pas s’en servir. Je me suis mis alors à en adapter.

J’ai aussi une amie à Paris qui vend des sex toys, et il lui arrive de me remonter des besoins pour des clients. Notamment grâce à l’imprimante 3D de mon Fablab, à Limoges, où j’habite aujourd’hui (le Limouzilab), et aux compétences en électronique des membres, je fais des adaptations. Je remplace ainsi les petits interrupteurs par des gros boutons poussoirs. Les molettes de réglage de la vitesse par des plus grosses, pour améliorer la préhension. J’adapte un vibromasseur à une brosse pour se gratter le dos, afin que la personne puisse l’actionner avec sa bouche, ou je le branche au joystick du fauteuil. Ce n’est pas une activité commerciale. Je le fais pour rendre service.

Contact : chadeyron@hotmail.com et 06 70 06 84 92

Retrouvez le programme du festival, et notamment l’exposition de photographies de Jérôme Deya, À mon corps dérangeant.

Réservation de l’exposition “À mon corps dérangeant” : contact@jeromedeya.com 

• Suivez l’actualité de ce projet sur Facebook : “likez” la page “À mon corps dérangeant” !

• Le photographe Jérôme Deya poursuit ce reportage et cherche de nouveaux couples qui accepteraient d’être pris en photo.

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