L’amour plus fort que la cérébrolésion, au coeur du film Bonhomme

Publié le 30 août 2018 par Élise Descamps
Nicolas Duvauchelle incarne Piotr, traumatisé crânien, recollant peu à peu les morceaux de son ancienne vie avec l'amour de sa compagne, interprétée par Ana Girardot.

Dans Bonhomme, sorti en salles mercredi 29 août, la réalisatrice Marion Vernoux campe un jeune couple frappé par la lésion cérébrale. Victime d’un traumatisme crânien, Piotr, remarquablement interprété par Nicolas Duvauchelle, souffre notamment d’hypersexualité. Grâce à l’énergie immense et l’amour fou de sa compagne, ils vont tenter de poursuivre leur chemin à deux. 

Dans son couple encore instable, son travail, sa bande de copains, Piotr est sûr de lui, beau garçon, populaire. Jusqu’à ce qu’un accident de voiture fasse basculer la suite de sa vie. Un traumatisme crânien sévère lui vaut des lésions cérébrales aux conséquences handicapantes.

Certes, il marche, est capable de tout faire ou presque et reste très attirant. Mais il a oublié son prénom, sa petite amie et, comme un enfant, il doit réapprendre à accomplir et organiser les tâches du quotidien, sans conscience de son propre état.

Désinhibition et hypersexualité

Surtout, il est désormais sans filtre. Il trouve que son appartement est laid, que son ergothérapeute sent mauvais et il saute littéralement sur sa compagne quand la libido grimpe. Et cela, souvent. Une hypersexualité maladive au point de faire imaginer à la réalisatrice, Marion Vernoux, un accommodement permettant à Marilyn de tenir le coup, psychologiquement et financièrement : le laisser faire commerce de son corps.

Remarquablement incarnée par Ana Girardot, Marilyn aurait pu fuir. Mais elle fait face avec la légèreté et la détermination de l’amoureuse faisant fi de la réputation. Elle lui passe toutes ses gaffes se surprenant elle-même de son nouveau statut de protectrice et de sa combativité face au juge des tutelles.

Dans tous les sens du terme, elle supporte Piotr devenu un autre. Elle lui rappelle le B.A.-ba et capte son attention en lui faisant faire des sudokus ou de la pâtisserie. Les progrès sont lents. Elle le confie à une nourrice puis ne doit compter que sur elle-même. L’appartement regorge de post-it quand elle s’absente pour son travail de vendeuse. « Si on te pose une question et que tu n’arrives pas à répondre, tu fais le geste de l’ordinateur qui tourne : ça charge », lui conseille avec une infinie tendresse Marilyn. Les obstacles restent nombreux mais le couple résiste.

Amour, fidélité et patience des aidants

Bonhomme dépeint de manière convaincante le handicap social méconnu et invisible provoqué par la cérébrolésion, le rôle inconfortable que doivent endosser les proches, devenus aidants, et l’incompréhension de la société. Mais grâce au doux et facétieux regard d’Ana Girardot, c’est d’abord un film sur la fidélité en amour et l’espérance d’une continuité entre deux êtres quand le chaos intérieur de l’un chamboule tout. C’est heureux, admirable, mais c’est un film : dans la vraie vie, dans la majeure partie des cas, les couples se séparent.

Le coaching de l’AFTC

Pour écrire le scénario, Marion Vernoux a notamment pris conseil auprès de médecins spécialistes et de l’Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens (UNAFTC). Celle-ci a, entre autres, fait se rencontrer acteurs et personnes cérébro-lésées et leurs proches.

L’un d’entre eux, fils de traumatisé crânien, Laurie Leulliette, de l’AFTC Nord-Pas-de-Calais (appelée Réveil), a coaché Nicolas Duvauchelle pendant quatre mois, contribuant à sa performance d’interprétation. « Avec lui, j’ai fait beaucoup de recherches. De la gestuelle à la façon de marcher, celle de se tenir, de s’exprimer, le fait de chercher ses mots, l’état d’absence, le syndrome de l’hypophonie, cette modification du timbre de la voix... », raconte l’acteur.

On peut espérer que le film contribue à mieux faire connaître la cérébrolésion même si l’on peut craindre aussi que le grand public la réduise à l’hypersexualité alors que cette maladie a tant d’autres facettes.

La fin du film ouvre une grande page d’espoir. Piotr, reconnu travailleur handicapé, est repris dans le magasin où il était jadis un vendeur performant et la belle chanson de Georges Moustaki, Le temps de vivre, accompagne les rêveries des deux amants.

Comment 2 commentaires

J’ai ressenti un profond malaise en sortant de la salle de cinema. L’hypersexualité semble être le sujet principal de ce film. Quel dommage! Certaines scènes sont choquantes, dérangeantes, impudiques.
Je n’ai pas passé un bon moment du tout et il me semble que ce film jette encore un peu plus de discrédit sur les traumatisés crâniens, qui font déjà un peu peur en général… je crains que ce film n’arrange rien, bien au contraire.
Car l’hypersexualité ne touche, heureusement, pas tout les traumatisés crâniens “frontaux”.
Il y aurait eu tellement d’autres choses à dire.

Et que dire de la prostitution de ce traumatisé crânien?… était-ce vraiment utile?

Je ne veux retenir que l’attachement de cette femme à son ami changé, sa belle fidélité.

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