Handicapés et plutôt (dé)culottés

Publié le 30 avril 2019 par Corinne Manoury
Une haie de fesses, ce mardi 30 avril sur la Place de Jaude de Clermont-Ferrand, pour rappeler à Emmanuel Macron qu'il devait faire du handicap une de ses priorités mais l'a oublié. © DR

Faut-il se mettre à nu pour être vu.e, entendu.e ou exister ? Ce sont les questions que posent des militant.e.s APF France handicap du Puy-de-Dôme. Avec une méthode particulière et humoristique.

Ils se sont donné rendez-vous à 14 heures Place de Jaude dans le centre de Clermont-Ferrand ce mardi 30 avril. Une quinzaine de femmes et d’hommes âgé.es de 20 à 60 ans. Tous avec leur fauteuil roulant customisé pour l’occasion avec de jolies paires de fesses habillées d’un seul string.

Des derrières dont ils feront une haie d’honneur aux voyageurs descendant du tram. Puis aux clients sortant du grand magasin donnant sur la place. Avec comme message sur leurs pancartes la nécessité de se mettre à poil pour être enfin remarqués ou entendus.

Le handicap oublié du Grand débat

« Ce sont des images trouvées sur Internet qui nous ont donné cette idée, explique Liliane Garand, chargée du développement des actions associatives à la délégation APF France handicap du Puy-de-Dôme. On y voyait des fesses sur les dossiers des fauteuils. Comme si les personnes montraient leur derrière… »

« Puisque le handicap a été totalement oublié du Grand débat alors qu’Emmanuel Macron en faisait une priorité pour son quinquennat, nous avons trouvé là une façon de nous rappeler au bon souvenir des gens », poursuit-elle.

Une opération choc qui a séduit adhérent.e.s et bénévoles. Comme Marie-Léa, 23 ans, la benjamine de l’opération. « Moi qui suis plutôt d’un naturel sérieux, j’ai hâte d’y être. C’est tellement drôle ! », confiait-elle quelques jours plus tôt.

Se moquer de l’injonction à se montrer nu.e

Pour elle, la jeune génération est une génération de m’as-tu vu s’exhibant sur les réseaux sociaux. Dénudée de préférence pour mieux marquer les esprits. Alors, se moquer de cette « injonction à se montrer nu », cela ne pouvait que lui plaire.

D’autant qu’elle s’estime trop souvent vue uniquement sous l’angle du handicap. « Les gens ont du mal à nous imaginer dans une vie normale avec un travail, des enfants… Ils ont encore une image de nous vivant obligatoirement en foyer », constate-t-elle.

Des ʺinvisiblesʺ dans la société

Laïla, 34 ans, se sent, elle, un peu invisible dans la société. « Nous portons beaucoup de revendications mais nous sommes rarement entendu.e.s », dit-elle, notant que, côté accessibilité, les choses sont loin d’être au point. Tandis que pour l’emploi, les obstacles restent nombreux : « On a accès à des études supérieures mais ensuite c’est un peu bloqué. »

Si la manifestation peut marquer les esprits de manière différente, ce sera donc très positif. William, 42 ans, pense aussi que cet affichage de fesses et strings est une bonne idée. « Cela va attirer l’attention. Et c’est bien de faire de la provoc, dit-il. Cela montre qu’on a de l’humour ! »

Rire pour mieux faire passer le message

Un humour qui aurait aussi des vertus pédagogiques pour Nadine, 57 ans. « Les messages positifs, drôles, sont toujours mieux perçus », dit-elle, contente que l’idée ait emballé toutes les générations. « C’est important que les jeunes s’impliquent, poursuit-elle. Là, c’est une action qui leur parle et qui leur fait prendre du recul par rapport à leur situation. »

Échanger, se rassembler et « se payer en même temps une bonne tranche de rigolade. »

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