Quelle Folie, documentaire décodant la “condition autistique”

Publié le 15 octobre 2019 par Elise Jeanne
Si le réalisateur capte formidablement la logorrhée fulgurante ou la tension anxieuse d'Aurélien, il le fait parfois à gros traits. Comme avec l’analogie entre un champ d’éoliennes et le fonctionnement psychique du protagoniste. © DR

Sorti en salles le 9 octobre, Quelle Folie est un documentaire offrant une plongée dans le monde intérieur, tempétueux et tourmenté d’une personne autiste. Et interroge, par là même, les frontières de la “normalité”.

Vous avez certainement déjà entendu dire que les autistes sont douillets, obsessionnels, hypersensibles aux odeurs, bruits, lumières, détails. Violents, si ce n’est “bizarres” et “inadaptés. Ces “on-dit” s’expliquent. Le documentaire Quelle Folie le décrypte lumineusement. Et s’emploie à nous faire entrer dans leur monde intérieur.

En l’occurrence celui d’Aurélien, bel homme extrêmement tourmenté se vivant comme inabordable aux autres. Il ne trouve aucun « point d’accroche » pour leur devenir accessible. Au final, il estime même vaine toute tentative de résoudre sa « déficience intrinsèque » et d’entrer dans « l’enclos des humains ».

L’intense douleur de se sentir coupé de ses semblables

À défaut de totalement le dédire, le documentaire Quelle Folie contribue à abattre des murs entre lui et nous (« les hommes structurés »), à nous faire passer de « l’autre côté », du sien. On perçoit ses ressentis, découvre tout ce qui l’ébranle et rend son fonctionnement psychique constamment instable. On mesure l’intense douleur de se sentir coupé de ses semblables.

Pour cela, plus de deux années de travail auront été nécessaires au réalisateur, Diego Governatori. Ami d’Aurélien, son documentaire résulte d’une sorte de recherche expérimentale menée, d’un commun accord, autour de l’autisme vu comme un handicap causant une « impossibilité d’être au monde » et une « discontinuité d’être ».

Manifestement, avec ce film, Diego Governatori a voulu aider Aurélien à se connecter aux autres et à lui-même. Voire lui prouver qu’il le peut. Un exemple ? Durant la Feria de San Fermin à Pampelune, en Espagne, troisième plus grande fête populaire au monde.

La logorrhée plus puissante que toutes métaphores

Imaginez tous les efforts auxquels Aurélien a consenti. On atteint d’ailleurs ici les limites du documentaire.

Si le réalisateur capte formidablement sa logorrhée fulgurante, sa tension anxieuse, son intériorité fragile et son ultra-lucidité tragique, il le fait parfois à gros traits. Avec la métaphore d’un taureau en souffrance à travers la feria ou encore l’analogie entre un champ d’éoliennes et le fonctionnement psychique du protagoniste.

Quelle Folie soulève des questions profondes. À quel prix intégrer le monde des humains pour celles et ceux se pensant mis en échec par ce monde ? Jusqu’à quel point les normes et coutumes de notre société ont un caractère excluant ? Et si la folie était la règle ?

Quelle Folie – 2018, 87 minutes. Séances et horaires.

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