Majeurs protégés en établissement : le droit de vote reste à conquérir

Publié le 9 septembre 2020 par Franck Seuret
Seuls les citoyens inscrits sur les listes électorales peuvent exercer leur droit de vote. Les établissements doivent donc aider leurs résidents à accomplir cette démarche. ©Ksiamon

Une étude d’Handéo révèle que moins de 40 % des Fam et des Mas avaient prévu d’aider leurs résidents à s’inscrire sur les listes électorales, avant les élections municipales. Pourtant, les majeurs protégés ont désormais tous le droit de voter.

C’est un droit inscrit dans la loi. Reste à en faire une réalité. Depuis mars 2019, tous les majeurs protégés sont autorisés à voter. Sans aucune exception. Jusqu’alors, lorsqu’il ouvrait ou renouvelait une mesure de tutelle, le juge statuait sur le maintien ou la suppression de leur droit de vote. La loi adoptée par le Parlement le 18 février 2019 a supprimé cette disposition du code électoral.

Aucun résident inscrit sur les listes dans 45 % des établissements

Un an plus tard, la réforme est loin d’avoir produit tous ses effets, à en croire les résultats d’une étude menée par Handéo. Avant les élections municipales de mars 2020, seuls 11 % des 63 maisons d’accueil spécialisés (Mas) et des foyers d’accueil médicalisés (Fam) ayant répondu au questionnaire avaient tous leurs résidents inscrits sur les listes électorales.

Plus inquiétant encore, dans 45 % de ces 63 structures, aucune des personnes accueillies n’y figure. Elles ne peuvent donc pas voter puisque cette démarche préalable est obligatoire.

« Développement mental entre 3 mois et 2 ans. »

Ce qui n’a rien d’étonnant lorsque sait que plus de six établissements sur dix n’avaient mis aucune action en place pour aider leurs pensionnaires à s’inscrire sur les listes. Parce que personne n’en a fait la demande, justifient, maladroitement, la plupart de ces Fam et Mas.

D’autres, presque aussi nombreux, estiment que ces majeurs protégés ne sont pas en capacité de voter. Leur « développement mental est compris entre 3 mois et 2 ans », précise l’un d’entre eux.

Des pratiques contraires aux recommandations

Quelques établissements considèrent, étonnamment, que ce n’est pas leur mission d’aider leurs résidents à s’inscrire sur les listes. Pourtant, dès 2013, l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services médico-sociaux (Ansem) recommandait de « proposer cet accompagnement ».

Et dans l’une des structures, on ignore même que la loi a changé !

De nombreux obstacles au vote

« La complexité pour comprendre » comment la personne peut très concrètement voter, le jour du scrutin « est également un frein à la dynamique d’inscription sur les listes électorales », souligne Cyril Desjeux, le directeur scientifique de Handéo services.

Le code électoral autorise en effet les majeurs protégés « dans l’impossibilité d’accomplir physiquement les opérations de vote » à se faire aider. Mais pas par un des salariés de l’établissement où il vit.

De plus, certains bureaux de vote ne sont pas accessibles. Quant aux programmes, ils ne sont pas, sauf exceptions, rédigés en facile à lire et à comprendre. Et puis, il n’y a pas de photo sur les bulletins. Autant d’obstacles qui compliquent la tâche des résidents souhaitant voter… mais ne doivent pas, pour autant, dispenser les établissements de les accompagner dans l’exercice de ce nouveau droit.

 

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