Accès aux soins : un nouveau moyen d’action en cas de discrimination

Publié le 14 octobre 2020 par Franck Seuret
L'inaccessibilité des cabinets freine l'accès aux soins des personnes handicapées. Elle pourrait constituer un refus de soins discriminatoire si le médecin ne cherche pas à trouver une autre solution.

Un décret vient de créer une procédure de conciliation et de sanctions en cas de refus de soins discriminatoire. Elle pourrait être utile aux personnes handicapées confrontées à l’inaccessibilité de nombreux cabinets médicaux.

C’est l’une des inégalités sociales les plus insupportables. Les personnes handicapées ont généralement moins accès aux soins que l’ensemble de la population française. Diverses études en montrent les effets délétères sur leur santé. En matière de prévention des cancers par exemple ou sur les soins dentaires.

Pas de rendez-vous pour les patients les plus modestes

En cause, entre autres, l’inaccessibilité de nombreux cabinets médicaux, ou de leurs équipements. Mais aussi les discriminations dont sont victimes les titulaires de la complémentaire santé solidaire, parmi lesquels figurent de nombreuses personnes handicapées. Le Défenseur des droits l’a démontré lors d’une opération test de grande envergure. Plus de 10 % des médecins n’acceptent pas d’accorder de rendez-vous aux bénéficiaires de telle mutuelle destinée aux ménages modestes

Une procédure de conciliation en cas de discrimination

Un décret, publié le 4 octobre au Journal officiel, vise à faciliter les recours des personnes s’estimant victime d’un refus de soins discriminatoire. Le texte crée une procédure de conciliation. Le patient devra saisir sa caisse d’assurance maladie ou le Conseil de l’ordre du professionnel. Une association peut l’aider à effectuer cette saisine.

Sanctionner les manquements au code de déontologie

Une commission mixte, composée de représentants de ces deux organismes, devra alors organiser dans un délai de trois mois une séance de conciliation. Et si le patient ne retire pas sa plainte, le président du Conseil de l’ordre est tenu de la transmettre à la juridiction ordinale compétente.

Cette dernière est chargée de sanctionner d’éventuels manquements commis par un médecin aux dispositions du code de déontologie médicale. Le décret définit aussi les sanctions applicables par les organismes d’assurance maladie.

Trouver une solution en cas d’inaccessibilité

« Le décret ouvre la porte à des actions de la part des patients handicapés discriminées, analyse Linda Aouar, avocate en droit des personnes en situation de handicap. Notamment si le cabinet du médecin est inaccessible. »

Y compris si celui-ci a obtenu une dérogation aux normes en vigueur dans le cadre des agendas d’accessibilité programmée ? « Pour le Défenseur des droits, si un professionnel n’est pas en mesure de respecter la réglementation accessibilité, il doit quand même trouver une solution pour assurer le service qu’il délivre à tous », poursuit Linda Aouar.

 « Aménagement raisonnable » impossible ?

« Le fait de ne pas être tenu, en vertu de la législation, de rendre son établissement accessible (pour des raisons liées, notamment, à une impossibilité technique ou à la conservation du patrimoine) n’autorise pas pour autant le gestionnaire d’un établissement à refuser l’accès à une personne handicapée dès lors qu’un aménagement raisonnable est envisageable, note en effet le Défenseur des droits, dans un de ses guides. Un tel refus serait discriminatoire. » Sauf s’il prouve qu’aucun « aménagement raisonnable » n’est possible.

Se déplacer chez le patient

Pour un médecin, un tel aménagement pourrait certainement consister à se déplacer chez le patient empêché de venir, par exemple. Ou à lui donner rendez-vous dans une salle accessible équipée du matériel nécessaire. La jurisprudence l’établira…

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