Covid-19 et handicap : la peur de ne pas être admis en réanimation

Publié le 5 février 2021 par Franck Seuret
L'admission en réanimation doit reposer sur une évaluation individuelle de l'état de santé de la personne et non sur des critères généraux comme l'âge ou le handicap. ©mrsiraphol

Durant le premier confinement, plus d’un tiers des personnes handicapées craignaient de ne pas bénéficier des mêmes soins que les autres, si elles contractaient le Covid-19. L’admission en réanimation dépend en effet d’une analyse bénéfices-risques. Et, lors de la première vague, certains hôpitaux engorgés ont demandé à des établissements de garder leurs résidents handicapés.

« Vu mon état de santé, je m’inquiète de savoir si je serais admis en réanimation. » Durant le premier confinement, Yann, 57 ans, atteint d’une maladie orpheline, avait fait part de ses craintes à faire-face.fr, au cas où il développerait une forme sévère de Covid-19. Et il n’était pas le seul à craindre d’être privé des soins nécessaires. Voilà ce que montrent les résultats d’une étude que vient de publier l’Irdes.

Détresse psychologique accrue

Plus de 1 000 personnes handicapées et/ou vivant avec une maladie chronique ont répondu au questionnaire en ligne de cet organisme de recherche reconnu. Entre la mi-avril et le 11 mai 2020, date de la fin du premier confinement. Plus d’un tiers d’entre elles avaient « peur de ne pas être prises en charge comme tout le monde pour des symptômes du coronavirus du fait leur état de santé ou de leur handicap ».

Cette inquiétude est « fortement associée à un risque accru de survenue de détresse psychologique, note l’Irdes.  J’ai doublé ma dose d’anxiolytiques pour limiter mes crises de panique », nous confiait d’ailleurs Yann.

La réanimation ? Un marathon

Ces craintes ne sont pas infondées. Car, en temps normal déjà, seuls sont admis en réanimation, les patients jugés aptes à supporter cette épreuve. « L’intensité des soins que l’on y reçoit équivaut pour le corps au stress résultant d’un marathon », a rappelé Agnès Ricard-Hibon, présidente de la Société française de médecine d’urgence, devant les députés.

Un score de fragilité clinique déterminant

Concrètement, l’équipe médicale prend de manière collégiale cette décision en se basant sur la volonté du patient et le bénéfice de la réanimation par rapport aux risques. Elle s’appuie, entre autres, sur son âge, ses comorbidités, son état neurocognitif mais aussi le score de fragilité clinique (CFS) (voir tableau en fin d’article). Le score 1 correspond à « très en forme ». À 8, la personne est « en état de dépendance complète à l’approche de la fin de vie ».

« Des études internationales (…) ont démontré que la mortalité en réanimation des patients âgés était largement médiée [influencée] par leur échelle de fragilité », soulignent des médecins, dans une tribune publié dans le Monde.

Une stratégie de triage

La société française d’anesthésie-réanimation distingue les cas de tension et de saturation, pour les services de réanimation.

Et lorsqu’il n’y a pas assez de places en réa ? Comment prioriser les patients ? Dans une note du 15 avril 2020, la société française d’anesthésie-réanimation (Sfar) et le services des armées détaillent la stratégie de « triage » à adopter.

Plus la pression sur l’hôpital s’accroît, plus le score de fragilité clinique recommandé pour accéder aux soins de réa est bas. Le CSF n’est toutefois pas le seul indicateur à prendre en compte. Et l’analyse au cas par cas reste fondamentale.

Une forme de régulation par l’âge

Mais, au plus fort de la crise du Covid-19, les médecins ont-ils pu continuer à rendre des décisions individuelles ? Ou les hôpitaux se sont-ils résolus à écarter des personnes, sur des critères généraux – l’âge ou le handicap – sans évaluer la situation de chaque patient ?

« Il n’y a pas eu de doctrine ministérielle ou régionale officielle recommandant d’opérer une régulation fondée sur l’âge », souligne la commission d’enquête parlementaire sur le Covid-19. Mais « une forme de régulation » basée sur ce critère « a parfois pu être opérée ». Notamment pour les résidents d’Ehpad.

« Le handicap ne doit pas être un critère de refus de soins. »

En avril, Olivier Véran avait rappelé les principes d’accès aux soins.

La commission ne dit mot sur le handicap. L’inquiétude des associations avait cependant poussé Olivier Véran a intervenir, le 4 avril dernier.

« Le handicap ne doit pas être un critère de refus de soins. Que l’on parle d’une hospitalisation simple ou d’une réanimation », avait martelé le ministre de la Santé.

Garder les résidents malades

Des personnes handicapées ont pourtant été victimes de la saturation des hôpitaux dans les régions les plus touchées. Le directeur général d’une association gestionnaire du Haut-Rhin en a témoigné dans Le Monde et les Dernières nouvelles d’Alsace. L’Agence régionale de santé le lui avait« fait comprendre clairement ». Les hôpitaux étant débordés, il devait garder ses résidents atteints du Covid-19. Six ont certes pu y entrer. Mais entre le 22 mars et le 3 avril, cinq sont morts au sein de sa Maison d’accueil spécialisée.

Idem dans le Territoire de Belfort, fin mars. Après l’hospitalisation d’un huitième résident, le médecin régulateur avait prévenu qu’il n’y avait plus de lit disponible. Le centre Pierre Grison de l’Adapei, s’était préparé à accompagner les fins de vie, comme le raconte son directeur dans faire-face.fr. Heureusement, plus aucun cas grave ne s’était déclaré. Mais la peur est restée.

Comment 1 commentaire

Le serment d hippocrate ne se discute pas. Le médecin qui ne le respecte pas doit être dénoncé à la l ordre des médecin qui statuera. Il existe un tre bon livre “Les droits du patient “.
Ma fille est résidente dans un foyer occupationnel, dernièrement la grande majorité des résidents étaient positifs symptomatiques et asymptomatiques, 3 residendents hospitalisée, 2 sont décédés tout etait fait avec beaucoup d humanisme. Ma fille étant négative j ai eu la possibilité de la garder à notre domicile, un nouveau PCR est prévu lundi. Je suis épuisée mais je peut compter sur l equipe éducative et de la psychologue. Ma fille a 46 ans.

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