« Le manque d’accessibilité globale de l’école fait peser sur les MDPH des attentes considérables »

Publié le 11 mai 2022 par Franck Seuret
Myriam Bouali : « Est-il nécessaire de passer par la MDPH pour qu'un enfant puisse bénéficier du matériel adapté dont il a besoin ? On peut se poser la même question pour l’attribution d'AESH mutualisé. »

L’association nationale des directeurs de MDPH vient de publier une lettre ouverte résolument offensive sur le manque d’accessibilité de l’école. Elle pointe du doigt « l’absence de réponses et de décisions pour une rentrée scolaire réussie ». Myriam Bouali, sa présidente, réclame une harmonisation nationale des pratiques et une simplification du cadre réglementaire.

Faire-face.fr : Pourquoi tirez-vous la sonnette d’alarme maintenant ?

Myriam Bouali dirige la MDPH de Paris.

Myriam Bouali : Depuis des années, les MDPH enregistrent une hausse continue des demandes concernant la scolarité. De plus en plus d’enfants en situation de handicap sont scolarisés, et c’est bien évidemment une bonne chose. Mais que les parents aient besoin de saisir la MDPH pour rendre effectif le droit à la scolarisation de leur enfant démontre le défaut d’accessibilité des établissements scolaires, des contenus pédagogiques, du matériel…

Des MDPH régulièrement pointées du doigt

Les MDPH sont régulièrement pointées du doigt. Elles accorderaient trop souvent des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) dans les plans personnalisés de scolarisation (PPPS *) qu’elles élaborent. Mais lorsque nous donnons suite à une demande d’aide humaine, c’est que les éléments du dossier sont concordants et légitimes. Les carences d’accessibilité rendent très souvent nécessaire le recours aux AESH pour ne pas freiner une scolarisation.

F-F.fr : Il existe pourtant d’autres outils que les PPS pour mettre en place des aménagements. Il y a le projet d’accueil individualisé (PAI), le plan d’accompagnement personnalisé (PAP) et le programme personnalisé de réussite éducative (PPRE) que les équipes de l’Éducation nationale peuvent élaborer sans que les parents aient besoin de saisir la MDPH.

M.B : Oui, mais ils ne sont pas suffisamment mobilisés. Et ce n’est pas étonnant, vu les limites de ces outils, combinées à celles de l’école. Le seul moyen d’obtenir du matériel pédagogique adapté, sans même parler des AESH, c’est de demander un PPS, c’est-à-dire de passer par la MDPH. Le manque d’accessibilité globale de l’école fait peser sur les MDPH des attentes considérables.

Un parcours difficile pour les enfants et les familles

F-F.fr : Vous écrivez que les MDPH « endossent par défaut un rôle de régulateur des demandes parce que l’ensemble du dispositif n’est pas adapté ». Qu’entendez-vous par là ?

M.B : Lorsqu’une MDPH attribue un AESH mutualisé, elle ne sait pas toujours le nombre d’heures dont va bénéficier l’élève. En effet, il n’y a pas d’harmonisation nationale sur le volume horaire de cet accompagnement mutualisé. Cela peut varier de six à douze heures.

Par ailleurs, le manque de solutions et de réponses adaptées tous secteurs et dispositifs confondus (IME, Ulis, Unités d’enseignement, etc.) rend très difficile les parcours des enfants et des familles. Faute d’orientation cible disponible [l’orientation idéale], les orientations alternatives [en attendant qu’une place se libère dans l’orientation cible] sont souvent des propositions très insatisfaisantes.

Une nécessaire harmonisation des règles au niveau national

F-F.fr : Que préconisez-vous alors ?

M.B : Nous demandons des règles harmonisées au niveau national, pour limiter les inégalités territoriales de traitement. On ne peut plus se contenter de la situation actuelle. Aujourd’hui, les MDPH adaptent leur fonctionnement au gré des discussions avec le rectorat et de ses pratiques. Il existe à peu près autant de départements que de configurations de coopération.

F-F.fr : Vous avancez également des propositions de simplification.

M.B : Est-il nécessaire de passer par la MDPH pour qu’un enfant puisse bénéficier du matériel adapté dont il a besoin ? Cela pourrait se régler dans le cadre d’un PAP ou d’un PPRE, pour lesquels la MDPH n’est pas sollicitée.

Pour un accès facilité à la scolarisation

On peut se poser la même question pour l’attribution d’AESH mutualisé. Est-ce que cela ne pourrait pas être du ressort des PIAL ? Ces pôles inclusifs d’accompagnement localisés étaient censés offrir une plus grande souplesse d’organisation de l’aide humaine à l’échelle d’un ou de plusieurs établissements.

Certes, nous comprenons que cela rassure les parents de savoir que l’évaluation des besoins de leur enfants soit assurée par un organisme tiers et indépendant. Mais ce que nous portons, c’est un accès facilité et simplifié à la scolarisation, ne faisant pas reposer sur les personnels de l’Éducation nationale ou des MDPH des règles disparates et une organisation complexe.

Pour lire la lettre ouverte, cliquez ici.

* Le PPS définit, pour chaque enfant, des aménagements et les adaptations pédagogiques à mettre en place. Mais aussi l’aide humaine nécessaire, le matériel requis…

Comment 5 commentaires

Bonjour,
Article très pertinent. On peut ajouter que même lorsqu’une aesh mutualisée est attribuée, l’ien, le rectorat, l’académie, l’école ne fourni pas toujours les aesh ! En cause les fameux quotas ! C’est notre cas, la mdph a attribué une aesh mutualisée à notre enfant en janvier 2020, on l’attend encore ! En attendant, les maîtresses se débrouillent comme elles peuvent, notre enfant aussi et son avenir en pâti, sans parler de notre implication encore plus sollicitée ! Les quotas font aboutir à des situations aberrantes, dans notre école élémentaire en 1ère banlieue de Toulouse, 4,25 Aesh ont été attribuées à l’établissement scolaire, la 0,25 c’est pour notre enfant. J’en aurais des éléments à fournir à ce sujet si cela vous intéresse, car j’aimerai bien alerter sur le non respect des droits de nos enfants !
Bien cordialement
Nathalie

Le manque d’accessibilité globale ne fait pas peser sur les MDPH, mais sur les familles et leurs enfants une attente intolérable !

Bonjour,

Je suis dans se cas là. Mon fils diagnostiquer dyslexique, dysorthographie avec un trouble de l’attention. L’enseignante ne veut rien mettre en place pour modifier la police ou autre outils pour aider mon fils. Donc je fait un dossier Mdph pour avoir une AESH pour l’accompagner.

Qu’elles sont les obligations de l’éducation nationale et des maîtresses concernant la mise en place d’outil et d’aide pour accompagner au mieux les enfants dys ??
Merci pour votre réponse.

Et pour ce qui est des enfants à énormes TDC inclut en classe mettant en danger les élèves et la maîtresse. On statue quoi. Ok pour l inclusion maiqbpas pour tous.

Conformément à la jurisprudence du tribunal judiciaire de Grenoble N°19/01587 du 20/11/2020, il convient de relever qu’il résulte de la lecture combinée des dispositions des articles L241-6 du code de l’action sociale et des familles, L112-1, L112-2, L112-4, L351, L352-1 du code de l’éducation, que les décisions relatives à l’organisation de la scolarité de l’élève en situation de handicap relèvent de la CDAPH dans la mesure où les mesures à mettre en œuvre doivent intégrer des considérations autant pédagogiques que médicales.

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