Droit à la vie privée : les enfants aussi

Publié le 17 novembre 2022 par Emma Lepic
Tous les enfants ne sont pas égaux face au respect de leur vie privée. Parmi les plus “vulnérables”, les enfants en situation de handicap et ceux vivant dans des conditions précaires.

Respect de l’intimité corporelle mais aussi du secret médical ou de leur correspondance : les enfants ont des droits et des libertés individuels. Mais ils doivent dans le même temps être protégés, en particulier contre toutes les formes de violence. Le respect de leur vie privée tient à cet équilibre entre liberté et sécurité. Pour l’atteindre, la Défenseure des droits formule, dans son rapport annuel, des recommandations en amont de la Journée internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre.

« Nul enfant ne fera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur ou à sa réputation. » Voilà comment la Convention internationale des droits de l’enfant définit le droit à la vie privée des mineurs, dans son article 16.

33 recommandations pour un droit effectif à la vie privée

Disposer d’une vie privée quand on est enfant est donc un droit juridiquement établi. Mais sa concrétisation se heurte à divers obstacles. En particulier pour les enfants qui vivent en collectivité. Et ceux qui connaissent des conditions précaires sur le plan économique.

Pour rendre ce droit effectif, la Défenseure des droits formule 33 recommandations à destination des parents et de tous les adultes qui accompagnent les enfants. Et ce, tant au sein de l’Éducation nationale que de la justice ou des établissements médico-sociaux.

Ces recommandations se trouvent dans le rapport des droits des enfants 2022. Intitulé La vie privée : un droit pour l’enfant, sa rédaction s’appuie sur le recueil des avis de 1 100 enfants. Certains sont porteurs de handicap. Parmi eux, les élèves de l’Institut d’éducation motrice (IEM) APF France handicap Le Petit Tremblay, dans l’Essonne.

Des jeunes d’un établissement APF France handicap donnent leur avis

Dessin, affiche, Playmobil… pour illustrer un ressenti ou une situation : une quinzaine de jeunes de l’Institut d’éducation motrice (IEM) APF France handicap du Petit Tremblay, dans l’Essonne, ont participé à la consultation nationale de la Défenseure des droits, en amont de son rapport 2022. Trois groupes de 4 à 6 volontaires ont ainsi travaillé sur la vie privée. Mais aussi l’image de soi et celle qu’on renvoie, le droit de s’habiller comme on veut, l’intimité en collectivité… Animant en binôme ces groupes de travail, des professionnels : psychologues, enseignante, éducatrice spécialisée, aide médico-psychologique. « J’ai choisi d’être en chambre double. C’est sympa, ça soude. Mais c’est difficile d’avoir de l’intimité dans ces conditions »,  explique Siloé, 14 ans, interne à l’IEM. « La question de l’image de soi renvoie au jugement, au harcèlement parfois, mais aussi aux comparaisons dans une fratrie », ajoute Mariem, 18 ans, en externat. Une expérience enrichissante qu’ils sont prêts à renouveler l’an prochain.

Mesures particulières pour les plus vulnérables

En préambule, la Défenseure des droits note que tous les enfants ne sont pas égaux face au respect de leur vie privée. Parmi les plus “vulnérables”, elle cite les enfants en situation de handicap et ceux qui vivent dans des conditions précaires. Ceux mal logés ou confiés à l’Aide sociale à l’enfance (Ase). Dès lors, certaines des recommandations ciblent plus particulièrement ces publics.

Pour les jeunes en difficulté du fait de conditions de vie précaires, la Défenseure des droits demande d’accroître le nombre de logements sociaux. Et de créer en ville des espaces dits de “ressourcement” pour les enfants mal-logés. Ce seraient des « lieux d’accueil inconditionnel » sur les temps non scolaires. Elle réclame aussi de prévoir des modalités de demande des impayés de cantine évitant toute implication et stigmatisation des enfants économiquement défavorisés.

Les enfants placés nécessitent aussi des mesures particulières. Comme le fait de veiller au maintien des relations avec leurs parents ou, dans les établissements qui les accueillent, celui de posséder des espaces de rangement personnels et des chambres individuelles.

Consentement et présence parentale

L’accès aux soins donne lieu aussi à un long chapitre au sein de ce rapport. L’idée générale consiste à dire que, comme en matière d’hébergement voire d’incarcération, les lieux d’accueil doivent être adaptés aux enfants. Ainsi la Défenseure des droits demande l’interdiction d’accepter des enfants au sein d’unités psychiatriques pour adultes.
Elle recommande aussi de définir l’information qui doit être donnée aux enfants et à leur famille sur l’état de santé, afin de recueillir le consentement des mineurs. Elle aimerait  également que la présence parentale et l’accueil des parents au sein des établissements de santé soient inscrits dans la loi.

Éducation au numérique

Enfin, le rapport réserve une large part aux enjeux posés par le numérique. Les réseaux sociaux peuvent causer de nombreux torts à la réputation des enfants, donner lieu à du harcèlement, nuire à leur droit à l’image et à l’oubli. D’où plusieurs recommandations visant, dans leur ensemble, à favoriser l’éducation au numérique tant des enfants que des parents.

Deux numéros de téléphone à connaître

La Défenseure des droits rappelle l’existence de deux lignes téléphoniques dédiées aux enfants :
– 30-20 : une ligne disponible en cas de harcèlement scolaire ;
– 30-18 : un autre numéro vert, contre les violences numériques.

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