Le handicap en 2022 : une année d’avancée pour les droits

Publié le 19 décembre 2022 par Franck Seuret
Sous la pression de l'opinion publique, des associations et de tous les autres partis politiques, la majorité présidentielle a fini par céder sur la déconjugalisation de l'AAH. Elle s'y était constamment opposée jusqu'alors.

En 2022, le Gouvernement a satisfait deux revendications de longue date : la déconjugalisation de l’AAH et l’ouverture de la PCH à d’autres handicaps. D’autres mesures favorables aux personnes handicapées ont aussi vu le jour : le rétablissement du complément de ressources après 62 ans, l’élargissement du Dalo au handicap ou bien encore la fin des surprimes d’assurance pour une partie des prêts immobiliers. 

La mobilisation aura fini par payer. 2022 restera l’année où la digue des minima sociaux a fini par sauter. Dans la chaleur caniculaire de l’été, le Parlement a adopté la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé (AAH). Certes, l’application de cette mesure n’est pas immédiate. Il faudra attendre octobre 2023 pour que les caisses d’allocations familiales ne prennent plus en compte les revenus du conjoint, concubin ou pacsé, dans le calcul du montant de cette allocation. Mais c’est bien cette année d’élection à l’Élysée qui a vu cette revendication de longue date enfin satisfaite.

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La position de la majorité présidentielle, qui s’y était constamment opposée lors du précédent quinquennat, n’était plus tenable. Les associations avaient remporté la bataille de l’opinion. Le Gouvernement a fini par céder. En revanche, les pensions d’invalidité, elles, continueront à être prises en compte pour déterminer le montant de l’Allocation supplémentaire d’invalidité (Asi). Deux poids, deux mesures.

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Travailler pour gagner plus, avec une pension d’invalidité

250 000 pensionnés d’invalidité exercent une activité professionnelle.

Toutefois, les pensionnés d’invalidité ont eu droit à une mesure. Elle est entrée en vigueur en novembre : une amélioration des règles de cumul de la pension avec des ressources professionnelles. Désormais, le seuil de revenus d’activité à partir duquel la pension diminue peut être plus haut qu’auparavant. Et à partir de ce seuil, le montant de la pension ne baisse plus d’un euro pour chaque euro gagné mais de 50 centimes. En résumé, travailler devient plus rentable… sauf dans certains cas (voir encadré).

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Bénéficier de la PCH quel que soit le handicap

Les personnes ayant besoin d’être stimulées et guidées pour accomplir les actes de la vie quotidienne ont droit à l’aide humaine au titre de la PCH.

Un autre combat de longue haleine a connu une issue positive en 2022 : l’accès à la prestation de compensation du handicap (PCH) pour les femmes et les hommes atteints d’un handicap psychique, cognitif, mental ou de troubles du neurodéveloppement. Un décret publié en avril leur en a élargi le bénéfice, à partir du 1er janvier 2023.

Concrètement, les personnes dont le trouble (concentration, cognition sociale, etc.) empêche de mener à bien les activités de la vie quotidienne pourront bénéficier, au plus, de  trois heures d’aide humaine par jour. C’est le cas, par exemple, si elles ont besoin d’être guidées ou stimulées pour faire leurs courses, se déplacer, ranger leurs affaires. Même si elles sont en capacité physique de le faire.

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Continuer à percevoir le complément de ressources après 62 ans

Les 179,31 € du complément de ressources s’ajoutent à la pension de retraite et à l’AAH différentielle.

Ce n’est pas un nouveau droit. Juste l’application de la loi. Jusqu’à présent, les caisses d’allocations familiales supprimaient le complément de ressources aux allocataires de l’AAH à leur 62e anniversaire, au motif que cette prestation s’arrêtait à l’âge légal du départ à la retraite. Une pratique illégale avait statué la Cour de cassation dans un arrêt rendu en 2019. Tout allocataire de l’AAH ayant un taux d’incapacité supérieur à 80 % peut continuer à percevoir son complément de ressources après ses 62 ans. Sous réserve, bien sûr, qu’il remplisse toujours les conditions y ouvrant droit.

Mais les Caf n’appliquaient pas cette jurisprudence. Il aura fallu que le ministère des Solidarités leur enjoigne de le faire, en mars 2022, pour qu’elles s’y résolvent. Désormais, elles ne suppriment plus le versement aux allocataires soufflant leurs 62 bougies. Mieux encore, elles remboursent ceux ayant déjà pris leur retraite.

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Ne plus payer de surprimes d’assurance

Avant d’accorder un crédit, toute banque exige que ses clients souscrivent une assurance emprunteur.

Autre petite révolution, dans un autre domaine : la fin des surprimes pour les emprunts immobiliers de moins de 200 000 €. Avant d’accorder un crédit, toute banque exige que ses client souscrivent une assurance emprunteur. Mais les assureurs rechignent à assurer les personnes présentant un risque aggravé de santé.

Or, le questionnaire médical permettant de détecter ces risques est devenu illégal le 1er septembre 2022. Tout du moins, pour un emprunt remplissant ces deux critères : son montant s’élève à moins de 200 000 € par personne assurée (soit 400 000 € pour un couple) ; l’emprunteur aura remboursé le crédit avant son soixantième anniversaire.

Dans ce cas, les assureurs ne disposent plus de moyen d’identification des risques. Ils ne sont donc plus en mesure de refuser un contrat, de demander une surprime et/ou de diminuer les garanties accordées.

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Pouvoir recourir au Dalo en cas de logement inadapté

Le préfet doit fournir un habitat aux personnes dont le droit au logement opposable a été reconnu. Dans les trois à six mois.

Mais tout le monde n’a pas les moyens d’acheter. Et trouver un logement accessible à louer n’est pas une mince affaire. La bonne nouvelle de l’année 2022, c’est que la loi 3DS, adoptée en février dernier, a fait évoluer les critères du droit au logement opposable (Dalo).

Depuis 2008, les personnes ne pouvant obtenir un logement décent et indépendant par leurs propres moyens ont la possibilité de demander à une commission de médiation de reconnaître leur droit au logement.

Jusqu’à février dernier, la loi définissait six situations ouvrant la possibilité de bénéficier du Dalo. Mais l’inadaptation de l’habitat à la situation de handicap n’en faisait pas partie. C’est ce que vient de changer la loi 3DS en ajoutant ce septième critère.

Reste à définir ce qu’est un  « logement non adapté » au handicap ? Le Haut Comité pour le  logement des personnes défavorisées a défini différents cas d’inadaptation, au-delà de la simple inaccessibilité. Mais pour l’heure, sa préconisation n’a pas encore été suivie d’effet. Ce qui n’empêche pas, d’ores et déjà, de déposer un recours Dalo.

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Des avancées… mais aussi des reculs

Les fonds de compensation conjugalisés. Pour l’AAH, c’est l’année de la déconjugalisation. Pour les fonds départementaux de compensation, en revanche, c’est l’heure de la conjugalisation. Ces fonds interviennent pour réduire le reste à charge des bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap sur l’achat d’une aide technique ou pour un aménagement de logement, par exemple. Ce reste à charge ne doit pas dépasser 10 % des  « ressources personnelles nettes d’impôt », selon la loi. Un décret d’avril précise le mode de calcul, qui n’avait jamais été défini. Mais le Gouvernement en a profité pour inclure les revenus du conjoint dans les ressources prises en compte. « Un recul inacceptable », a fustigé le Conseil national consultatif des personnes handicapées.

Un plafond pour le cumul pension + revenus d’activité. La réforme du cumul s’accompagne d’une mesure pénalisante pour les mieux lotis des pensionnés d’invalidité. Elle instaure, en effet, un plafond – celui de la Sécurité sociale, soit 43 992 € par an (3 666 € par mois) – au-delà duquel le montant de la pension va diminuer pour que l’ensemble des ressources du pensionné ne dépasse pas ce seuil de 3 666 €. Plafond qui n’existait pas jusqu’alors.

Comment 4 commentaires

nom de dieu
on a jamais autant perdu. nous les invalides
et le type te dis que tu y gagnes !!!
désabonnement recommande
de quoi vit ce type ni invalide ou handicape

Chère Valérie Desnot,
l’outrance n’est jamais bonne conseillère.
Cette réforme cumul pension et revenus du travail est une aubaine pour les plus modestes… et une très mauvais nouvelle pour ceux dont le cumul dépasse 3 660 € par mois.
Tout est clairement expliqué dans cet article : l’aspect positif dans le corps de l’article principal ; le recul dans l’encadré.
Et vous trouverez le détail dans cet autre article
https://www.faire-face.fr/2022/12/01/pension-invalidite-cumul-revenus/
Donc ce n’est pas “nous les invalides, qui perdons” comme vous l’écrivez mais une partie des invalides qui perd. Nous l’expliquons et le déplorons tout autant que vous, mais pas de manière caricaturale.

Bonjour moi je touche une pension d’invalidité je suis à 80 %
Et je touche une rente en plus j’ai 60 ans , quand je serait à la retraite est ce que je garde ma rente en plus de ma pension de retraite ? Merci .
Cordialement .

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