Un projet pilote pour dépister l’amyotrophie spinale à la naissance 

Publié le 27 janvier 2023 par Pauline Hervé
Dépistée avant six semaines chez le nouveau-né, la maladie peut être stoppée grâce à des traitements dont on dispose déjà.

Cette maladie génétique, qui atrophie progressivement les muscles, peut être traitée efficacement si on la détecte avant les premiers symptômes. Les maternités du Grand Est et de Nouvelle Aquitaine vont expérimenter durant deux ans son dépistage à la naissance. Explications du Pr. Vincent Laugel, neuropédiatre au centre de référence des maladies neuromusculaires à l’Hôpital universitaire de Strasbourg, et l’un des promoteurs du programme Depisma, lancé avec le soutien de l’AFM-Téléthon.

Faire-face.fr : Quel est le but du programme Depisma qui a commencé en décembre ?

Pr. Vincent Laugel : L’amyotrophie spinale infantile (ou SMA) est une maladie génétique rare qui touche les neurones moteurs. Elle est provoquée par la mutation du gène SMN1. En France, on dispose depuis cinq ans de médicaments qui stoppent sa progression. Cependant, la plupart des enfants malades gardent un handicap. Le problème, c’est que lorsque les symptômes de la SMA apparaissent, cela signifie qu’une partie des neurones moteurs sont déjà touchés. Et on ne peut pas les réparer. D’où l’importance de détecter la maladie au plus tôt, c’est-à-dire dans les six premières semaines de vie. Ceci pour mettre en place ces traitements qui empêcheront les neurones moteurs de se dégrader.
Le dépistage néonatal est possible : il est déjà pratiqué dans la majorité des pays occidentaux. Notre but n’est pas de montrer son bien-fondé scientifique, déjà reconnu, mais d’en démontrer la faisabilité dans le système français, pour, on l’espère, l’élargir à tout le pays.

F-F.fr : Comment se déroule le dépistage ?
Pr. V.L  : Pour les parents et les nouveau-nés, ça ne change rien à ce que l’on pratique habituellement. En France, chaque enfant subit, après sa naissance, le test de Guthrie ou “test du buvard”. Une piqûre au talon permet de prélever une ou deux gouttes de sang. On les analyse ensuite à la recherche de marqueurs biologiques de 13 maladies rares. Avec Depisma, nous prélevons juste du sang en plus pour un buvard supplémentaire. On envoie ensuite celui-ci dans un laboratoire pour effectuer une analyse génétique du sang. Ces analyses génétiques ne sont autorisées en France que depuis l’adoption de la loi de bioéthique de 2021. Les résultats arrivent ensuite en quelques jours.

F-F.fr : Pour quand espérez-vous une généralisation du dépistage à toute la France ?

Pr. V.L  :  Nous travaillons  depuis trois ans sur ce programme, en associant les autorités de santé à notre démarche. Dès que possible, nous les informerons des résultats. Nous en espérons une généralisation avant l’échéance des deux ans prévus pour ce programme. À plus long terme, le but est aussi d’ouvrir la voie au dépistage d’autres maladies génétiques rares qui disposent d’un traitement efficace avant les symptômes.

AFM-Téléthon: « Sortir de cette situation inacceptable »
L’association est à l’origine du projet Depisma. « À l’heure actuelle, alors que les traitements sont disponibles, mais en l’absence de dépistage néonatal, les bébés atteints de la forme la plus grave d’amyotrophie spinale, une soixantaine par an, sont repérés trop tard, souligne Christian Cottet,  son directeur général. En conséquence, ceux qui ont des symptômes encore modérés sont traités mais pas dans la meilleure fenêtre d’efficacité thérapeutique. Ils conserveront des séquelles parfois importantes. Pire : ceux pour lesquels les symptômes sont les plus avancés ne sont pas traités et meurent avant deux ans. Le dépistage génétique de l’amyotrophie spinale est la seule solution pour sortir de cette situation inacceptable.»

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