Des ateliers dédiés à la vie affective et sexuelle des aidants

La relation d’aide, au conjoint, à un parent ou un enfant, met souvent à mal la vie intime, sentimentale et sexuelle. Pour permettre aux aidants de se la réapproprier, APF France handicap leur propose une série d’ateliers, gratuits, en visio, basés sur l’expression, le développement personnel et les pratiques corporelles. Entretien avec Élise Martinez, cheffe de projet aidants au sein d’APF France handicap Paca.

Faire-face.fr : Comment sont nés ces ateliers sur la vie intime, sentimentale et sexuelle ?

Élise Martinez : Depuis 2020, APF France handicap organise des ateliers en visio, gratuits, à destination des aidants. Ils peuvent s’y ressourcer, prendre du recul, mieux comprendre ce qui se joue dans la relation d’aide.
Le distanciel permet de lever deux des principaux freins à la participation aux ateliers en présentiel. D’une part, la difficulté de s’absenter de la maison. D’autre part, la crainte de confier la personne aidée à une tierce personne.

La question de la vie intime, affective et sexuelle est invisibilisée. »

Les thèmes de l’année sont toujours définis, au préalable, avec les personnes concernées. Elles ont ainsi demandé la mise en place d’un cycle consacré à leur vie intime, affective et sexuelle, car elles se sentent totalement démunies. Cette question est invisibilisée. Pourtant, la relation d’aide impacte forcément leur vie intime, dans ses dimensions physique, relationnelle ou encore psycho-affective. En effet, comment se sentir équilibré, lorsqu’on n’est pas épanoui affectivement ?

Ce n’est pas un sujet secondaire. Et pourtant, il n’y a aucune ressource existante sur cette question. Ce que nous proposons est totalement nouveau. Ces ateliers sont complémentaires au salon Amours et handicaps, qui se tiendra les 6 et 7 octobre 2023, à Hyères, dans le Var.

F-f.fr : Comment la relation d’aide joue-t-elle sur la vie affective et sexuelle des aidants ?

E.M : La relation d’aide a tendance à prendre le pas sur tout le reste. Beaucoup d’aidants ne s’autorisent plus à s’accorder du temps. Ils culpabilisent. Et puis, ils sont fatigués, ce qui ne favorise pas la libido. Cela vaut dans tous les types de situation d’aide.

 Le corps qu’on soigne prend le pas sur le corps qu’on aime. »

Être aidant de son conjoint peut également jouer sur le rapport au corps. Le corps qu’on soigne, qu’on lave prend le pas sur le corps qu’on aime, que l’on caresse.

Être aidant de ses parents peut aussi avoir des conséquences sur le rapport à son propre corps. Faire la toilette de son père ou de sa mère est un acte physique. On touche, dans son intimité, un corps qu’on n’est pas supposé toucher dans ces conditions. Cette inversion de rôles parent/enfant est susceptible d’avoir des répercussions psychiques sur le rapport à son propre corps et à celui de l’autre.

F-f.fr : Certains aidants éprouvent-ils encore du désir alors que celui-ci est éteint chez la personne aidée ?

E.M : Cela arrive également. Dans ce cas, cette baisse du désir est-elle passagère et comment la ranimer  ?

Que puis-je m’autoriser en dehors du couple ? »

Et si elle est irréversible, que faire de mon propre désir ? Que puis-je m’autoriser en dehors du couple, sans remettre en cause ma place auprès de mon conjoint ou de ma conjointe ? Toutes ces questions sont légitimes. Et il n’y a pas une seule et unique réponse.

F-f.fr : Quelles techniques proposez-vous pour aider à trouver des réponses ?

E.M : Nous proposons trois types d’ateliers, d’une durée de deux heures. Du développement personnel, pour renforcer l’estime de soi et son pouvoir personnel et, ce faisant, améliorer ses relations. C’est, en effet, difficile d’aller vers l’autre quand on ne s’aime pas soi-même. Des outils d’expression, qu’il s’agisse de groupes de parole, d’écriture ou d’art-thérapie pour libérer ce qu’on a à dire. Des pratiques corporelles, comme la relaxation, la danse, le yoga ou bien encore le tantra qui vont permettre de ressentir du plaisir dans son corps. Chacun est animé par un professionnel, parfois en collaboration avec un pair-aidant.

F-f.fr : Quel est l’enjeu de ces ateliers ?

E.M : Notre société a une conception très normée de la sexualité dans laquelle de nombreux aidants ne se retrouvent plus. S’ils souhaitent renouer avec une vie affective et sexuelle, ils devront peut-être inventer leurs propres normes, adaptées à leur situation.

Si le désir a disparu, il faut d’abord retrouver le chemin de l’envie. Cela peut passer par un autre langage affectif avec la personne aidée, basée sur la lenteur, la langueur, l’érotisme, la découverte d’autres zones érogènes… Cela peut aussi se faire sans la personne aidée, si ce n’est pas possible en sa compagnie, avec ou sans objets sexuels… Les possibilités sont extrêmement variées. Reste à les explorer.

Les ateliers à venir

APF France handicap propose ces ateliers en visio, gratuits et accessibles sur la France entière, avec le soutien de la Caisse primaire d’assurance maladie du Var et de la Carsat Sud-Est :

Vendredi 21 avril / Développement personnel : C’est quoi aimer ? Une grande histoire de vie, regard interculturel et philosophique.

Mercredi 3 mai / Atelier d’écriture : Les paradoxes amoureux dans la relation.

Lundi 15 mai / Atelier d’échange et d’expression corporelle : Passer d’aimant à aidants… quand l’aide s’immisce dans la relation.

Lundi 22 mai / Atelier d’écriture : Écrire ce qui est délicat autour de l’amour et des soins.

Mardi 6 juin / Développement personnel : Visiter les représentations autour de la sexualité à travers les âges.

Mardi 13 juin / Groupe de parole : Partage sur sa vie.

Mardi 20 juin / Atelier d’écriture : Échange autour de la notion de plaisir.

Mercredi 28 juin / Atelier d’écriture : Oser être en vie/envies, la question des désirs latents.

Pour vous inscrire à ces ateliers réservés aux aidants, cliquez sur ce lien.

Pour les patients Sep

Par ailleurs, toujours sur ce même thème de la vie intime, affective et sexuelle, APF France handicap organise un webinaire pour les patients atteints de sclérose en plaques et leurs proches, le 16 mai de 11 h 30 à 13 heures. Pour vous inscrire, cliquez sur ce lien.