Un kiné condamné pour le viol de trois résidentes handicapées

Publié le 24 avril 2023 par Franck Seuret
Les jurés ont entendu la parole des victimes, atteintes de troubles autistiques majeurs, quand bien même leur crédibilité avait été remise en cause par les salariés de l'établissement. © Pikisuperstar/Freepik

La cour d’assises des Alpes-Maritimes a infligé une peine de 15 ans de prison à un kinésithérapeute coupable de viol sur trois résidentes autistes d’un établissement spécialisé où il exerçait. Un jugement exemplaire tant les condamnations sont rares dans ce type d’affaire. 

Olivier Benham a clamé son innocence tout au long du procès. Mais ses dénégations n’ont pas convaincu les jurés. La cour d’assises des Alpes-Maritimes a ainsi jugé ce kinésithérapeute coupable d’« agressions sexuelles sur personnes vulnérables par personne abusant de l’autorité de sa fonction » – en l’occurrence, sur quatre résidentes handicapées d’un foyer d’accueil médicalisé (Fam) où il intervenait – et de « viols » sur trois d’entre elles.

Un résident témoin des viols avait lancé l’alerte

Les faits se sont produits entre 2015 et 2017, dans la salle de kiné du foyer. Le directeur du Fam Les Baous, à Vence dans les Alpes-Maritimes, avait alerté la justice en février 2017, à la suite du signal lancé par un autre résident, témoin d’un des viols. Samedi 15 avril, la cour a condamné Olivier Benham à 15 ans de réclusion. Les jurés ont donc entendu la parole des victimes, atteintes de troubles autistiques majeurs.

La majorité du personnel très «  réservée  » sur les accusations

Leur crédibilité avait pourtant été remise en cause par les salariés de l’établissement, comme l’avait révélé Le Parisien, en s’appuyant sur le dossier d’instruction. Julie* est décrite par des professionnelles du foyer comme une « menteuse pathologique » ayant dénoncé à tort « à plusieurs reprises des faits de viols ». Charlotte aurait « une tendance à inventer des choses ».

« La majeure partie des membres du personnel (…) se montrait très réservée concernant les accusations des jeunes filles dont elle considérait les propos comme peu fiables, les affublant de qualificatifs tels que menteuses, influençables ou aguicheuses », souligne l’ordonnance de mise en accusation.

Le Parisien évoque aussi le rapport très décomplexé à la sexualité de certaines des plaignantes. Notamment leur forte consommation de films pornographiques.

« Il me bloquait entre l’espalier et le mur et voulait des rapports sexuels »

Devant la cour, comme le rapporte Nice Matin, les plaignantes ont maintenu leurs accusations. Selon elles, les séances de kiné « dégénéraient », allant parfois jusqu’à des pénétrations.

« Il me bloquait entre l’espalier et le mur. Il voulait avoir des rapports sexuels avec moi. Il plaçait ses mains sur ses parties intimes, sur les miennes, sur ma poitrine », a témoigné l’une d’entre elles. « Le kiné, il me tripote, là et là », décrit Chloé.

Un père de famille sans antécédents

Olivier Benham, lui, est resté sur sa ligne de défense. « Je n’ai violé personne, je n’ai agressé sexuellement personne, a-t-il clamé. Je ne comprends pas pourquoi elles disent ça. Je suis innocent des faits qu’on me reproche. »

Parole contre parole. D’un côté, des femmes handicapées, atteintes de troubles autistiques et de déficiences mentales. De l’autre, un père de famille de 36 ans, sans antécédents judiciaires. Mais, à l’issue des trois jours d’audience, les jurés ont estimé que c’est Olivier Benham qui mentait.

Du sperme sur les murs de la salle de kiné

Un élément a certainement pesé dans la décision des jurés. Les enquêteurs avaient, en effet, retrouvé des traces de sperme dans la salle de kiné. Sperme dont les analyses ADN avaient révélé qu’il appartenait bien à Olivier Benham. Ce dernier s’est justifié en assurant qu’il s’était masturbé, sur son lieu de travail, en consultant des contenus pornographiques. Sa défense n’a visiblement pas convaincu.

« Les victimes ont été crues »

« Cette affaire est exemplaire car, bien souvent, les agressions sexuelles et les viols subis par les femmes handicapées n’arrivent même pas devant les tribunaux, rappelle Marie Rabatel, la présidente de l’association francophone de femmes autistes. Comme si leur parole ne valait rien ou pas grand-chose. Cette fois, elles ont été crues. » L’avocat du condamné a toutefois fait appel. Un nouveau procès devrait donc avoir lieu.

Autre point à souligner : l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes s’était porté partie civile dans ce procès. Depuis la mise en examen d’Olivier Benham – donc, avant l’issue du procès, il lui avait interdit d’exercer.

« Reste que la question de la responsabilité de l’établissement devrait également se poser lorsque des violences sexuelles surviennent, poursuit Marie Rabatel. Quand on sait à quel point les personnes handicapées y sont surexposées, est-il encore possible de prendre le risque de laisser des hommes seuls avec des femmes particulièrement vulnérables ? »

* Le Parisien a modifié les prénoms.

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