Marie-Sol St-Onge, artiste peintre quadri-amputée : « Aucune limite ne peut freiner notre créativité »

Publié le 5 avril 2023 par Claudine Colozzi
La Québécoise Marie-Sol St-Onge n'hésite pas à raconter son histoire à travers des conférences et dans les médias pour rendre plus visibles les personnes handicapées. © DR

Il y a onze ans, la Québécoise Marie-Sol St-Onge a été victime d’un choc septique causé par une bactérie (streptocoque du groupe A). Quadri-amputée, cette artiste peintre, aujourd’hui âgée de 45 ans, maman de deux enfants, a retrouvé ses pinceaux. Et à travers des conférences, accompagnée de son mari Alin, elle s’est donné comme mission de sensibiliser au handicap. Avec l’énergie communicative et l’optimisme qui la caractérisent.

« Le 8 mars 2012, ma vie a basculé. J’ai été admise en urgence à l’hôpital de Trois-Rivières, la ville où je vis au Québec. J’ai été victime de la bactérie mangeuse de chair ou streptocoque A qui circulait dans la classe maternelle de notre plus jeune fils. Malgré la violence du choc septique, j’ai survécu mais j’ai dû être amputée de mes quatre membres complètement nécrosés.

Je suis restée hospitalisée durant quatre mois et demi. De tous les moments difficiles que j’ai traversés, c’est sans doute cette période qui reste la plus douloureuse. Malgré la présence de mon mari Alin, vivre éloignée de ma famille a été pire que tout. J’ai tout de suite pris conscience de la gravité de mon handicap. Et, j’ai très vite été dans l’acceptation. Mon goût de vivre n’a pas disparu.

Quand la maladie est survenue, nous venions de lancer notre entreprise de peinture artistique un an auparavant. Pendant dix ans, j’avais travaillé dans des ateliers de fabrication de décors à Montréal. Nous avions choisi de nous installer à Trois-Rivières avec nos deux garçons. Ma première réaction a été de me demander si je pourrais reprendre mes activités. Ma passion pour le dessin et la peinture remonte à l’enfance. Impossible de m’imaginer faire autre chose.

Un premier dessin à l’aide d’un crayon attaché à son moignon

Un jour, Alin a attaché un crayon à mon moignon avec du ruban adhésif et m’a tendu une feuille blanche. J’ai commencé par ma signature. Cela représentait beaucoup pour moi. Ne plus signer, c’est ne plus avoir sa place dans la société. Ma signature n’avait pas changé. Ça m’a donné du courage pour continuer. J’ai dessiné une petite fleur qui m’a plu. J’ai recommencé à peindre avec mes prothèses. Mon trait a changé, mais c’est ce qui fait ma singularité. Lorsque l’art nous habite, aucune limite ne peut freiner notre créativité. Il faut juste travailler un peu plus fort pour continuer à l’exprimer.

Je n’ai pas tout de suite été tournée vers les autres. Je devais d’abord vivre ma propre histoire. Et puis le besoin d’échanger et de partager est arrivé. D’abord via les réseaux sociaux par lesquels j’ai reçu beaucoup d’amour. Alors j’ai continué à poster des nouvelles régulièrement avec ma personnalité et mon humour qui aident à dédramatiser. Puis, nous nous sommes lancés dans des conférences avec Alin, mon inconditionnel soutien dans tout ce que j’entreprends.

J’aime particulièrement aller dans les écoles où nous animons également des ateliers artistiques. Au début, les enfants sont intrigués. Ils n’osent pas venir vers moi. Et on se quitte en se faisant des câlins ! J’ai envie de leur dire que le handicap n’est pas une fatalité. On peut avoir une belle vie même si on traverse des épreuves difficiles.

Au Québec, les personnes handicapées sont invisibilisées

Au Québec, selon l’origine du handicap (accident ou maladie) l’indemnisation n’est pas la même. Nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne, ce qui me semble injuste. J’ai conscience d’être chanceuse. Tout a été pris en charge. J’ai pu bénéficier des aides techniques et des prothèses les plus sophistiquées.

C’est aussi pour cela que je témoigne chaque fois que l’on me sollicite. Car il est un fait certain qu’au Québec, alors qu’elles représentent 16 % de la population, les personnes handicapées sont invisibilisées. Nous voir davantage dans les médias contribuerait à créer une société plus inclusive et tolérante. »

Publié en mars 2020, Se relever sans mains ni pieds de Marie-Sol St-Onge est disponible en France uniquement en format ebook.

Retrouvez les chroniques de Marie-Sol sur le Nouvelliste.

Comment 1 commentaire

Inspirante Marie-Sol! Une femme magnifique et respendissante qui ne l’a pas eu facile mais elle a choisi de s’épanouir. Bravo!

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