Série 3/5 Droits des femmes – Carolyne Dexet, femme transgenre : « Cette opération, c’était une libération »

Publié le 6 mars 2024 par Emma Lepic
« Je partais avec deux valises. Dans ma voiture, je m’habillais en femme. J’étais heureuse. Je me changeais de nouveau en arrivant. Je ne disais rien à personne .» © AdobeStock

Après s’être cachée pendant vingt ans pour se travestir et porter aussi souvent que possible des vêtements féminins, Carolyne Dexet, 68 ans, a entamé sa transition en 2016. Un choix d’assumer sa transidentité violemment rejeté par sa famille dans un premier temps. Mais petit à petit, les liens se sont resserrés et Carolyne se dit aujourd’hui heureuse, forte d’une vie sociale épanouissante.

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« Je suis à 100 % satisfaite de ma vie de femme », affirme-t-elle. Femme, Carolyne Dexet a dû le devenir. Plus encore que celles qui sont nées avec un sexe féminin.

L’histoire commence dans les années 90. En 1991, un accident de luge laisse celle qui ne s’appelle pas encore Carolyne paraplégique incomplète. Elle doit brutalement fermer son entreprise de menuiserie et en quelque sorte “réapprendre” à vivre en famille. « Ma priorité a été de me requinquer », explique-t-elle. Un rétablissement qui a compris un séjour en hôpital psychiatrique, pour soigner la dépression post accident.

Une amitié fondatrice

Là, Carolyne fait une rencontre décisive, celle de Michel, un homme travesti en femme. Naît alors une profonde amitié qui lui fait dire aujourd’hui : « C’est bien plus tard que j’ai compris en quoi c’était un événement déclencheur ».

Dans le même temps, Carolyne divorce de la mère de ses enfants. Elle s’installe avec une autre femme, qui partagera sa vie une quinzaine d’années. « Je lui piquais ses vêtements. Elle s’en est rendu compte parce que je ne les pliais pas de la même manière qu’elle. Je m’achetais aussi des vêtements d’occasion au Secours populaire, où j’étais bénévole. Dès qu’elle avait le dos tourné, je me changeais. »

Une identité tenue secrète

Impossible à admettre pour sa compagne, infirmière en psychiatrie : « Elle a voulu me soigner. Nous avons suivi une thérapie de couple. » Sans résultat.

Le couple, installé dans les Deux-Sèvres, déménage souvent. « Je me coupais de mes fréquentations pour que personne ne sache. Je m’isolais », justifie Carolyne, qui vit son identité dans le plus grand secret. « Dès que j’avais l’occasion de m’échapper pour des déplacements associatifs, je partais avec deux valises. Dans ma voiture, je m’habillais en femme. J’étais heureuse. Je me changeais de nouveau en arrivant. Je ne disais rien à personne, sauf à de rares amis parisiens. »

Une transition plutôt rapide

Cette double vie devient vite impossible. S’ensuit une séparation et Carolyne fait alors le choix de la transition, en démarrant, en 2016, ses recherches.

Pour obtenir le remboursement du traitement hormonal, elle trouve un endocrinologue. Elle sollicite aussi le soutien d’Adheos, l’Association nationale d’aide, de défense homosexuelle, pour l’égalité des orientations sexuelles. Elle procède aux épilations…

En 2017, elle réalise une chirurgie mammaire en Belgique. Puis en 2018, vient le temps de l’orchidectomie bilatérale, c’est-à-dire l’ablation des testicules. « Je n’ai rien senti. Cette opération, c’était une libération. J’étais la plus heureuse des femmes. Je chantais dans ma voiture en revenant de l’hôpital », confie-t-elle.

Une lente acceptation de la famille

Le coming out, lui, s’avère plus douloureux. Pendant plus de trois ans, les trois enfants de Carolyne la rejettent . Jusqu’au mariage de son fils cadet, qui permet à la famille de se retrouver. « J’ai beaucoup bataillé », avoue-t-elle.

Et ce, plus que vis-à-vis du reste de la société. « Du fait de mon handicap, j’avais un avantage, note-t-elle. Je redoutais moins le regard des autres. » Elle s’est aussi sentie bien accueillie au sein de la communauté LGBT, devenant bénévole à Adheos. Certes, elle a dû porter plainte contre ses voisins qui l’ont insultée. Mais en dehors de cette manifestation de transphobie, Carolyne estime que son handicap l’a plutôt protégée quant à son choix de transition.

Le souhait d’être aimée pour ce qu’elle est

« J’assume d’être une femme transgenre. Mais par ailleurs, je suis une femme normale, dit-elle. J’ai aujourd’hui une vie sociale très épanouissante. » Avant d’ajouter qu’il lui reste à écrire une nouvelle page de vie affective : « J’aimerais rencontrer un homme qui m’aime pour ce que je suis, pas pour ce que je représente. Si je n’étais que transgenre, peut-être que j’y arriverais. Mais là je pense que j’éprouve la même difficulté que les autres femmes handicapées. »

Comment 1 commentaire

Bonjour, je connais Caroline depuis quelques années, maintenant, et je l’adore. Elle fait beaucoup pour les autres et mérite effectivement de trouver un Amoureux. Merci pour cet article fidèle à Ma Copine !

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