Aide aux parents handicapés : désaccords autour du berceau

Publié le 26 novembre 2020 par Franck Seuret
Les parents allocataires de la PCH pourront bénéficier d'un forfait d'aides humaines et aides techniques à partir du 1er janvier 2021. Le décret est attendu dans les jours à venir.

APF France handicap dénonce que la nouvelle aide à la parentalité soit un forfait limité ne répondant pas aux besoins réels. Et l’Unafam déplore que de nombreux parents ayant un handicap mental, cognitif ou psychique n’y auront pas droit. Le secrétariat d’État plaide, lui, le pragmatisme de la solution retenue.

C’est un accouchement dans la douleur. L’aide à la parentalité pour les pères et les mères handicapés va voir le jour en janvier 2021. Mais l’enfant à naître est loin de faire l’unanimité.

APF France handicap a fait part de sa « désillusion », dans un courrier adressé au Premier ministre, le 18 novembre. Et Roselyne Touroude, la vice-présidente de l’Unafam, l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques, dénonce le caractère discriminatoire des critères d’accès (voir encadré ci-dessous). En revanche, Sophie Cluzel, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, se félicite de cette « énorme avancée ».

Le même forfait quel que soit le besoin

Pour APF France handicap, la forfaitisation de l’aide pose problème. Tous les parents allocataires de la prestation de compensation du handicap (PCH), quels que soient leurs besoins, bénéficieront en effet du même volume d’heures d’aide humaine pour effectuer les tâches que leur handicap les empêche d’assurer eux-mêmes. Comme donner le bain à l’enfant, le faire manger ou bien encore l’aider à s’habiller.

« Contraire au principe d’individualisation de la PCH. »

Le Premier ministre a confirmé la création du forfait parentalité, lors du Comité interministériel du handicap, le 17 novembre.

« C’est contraire au principe d’individualisation de la PCH qui aurait permis à chaque parent en situation de handicap d’avoir une prestation adaptée à ses besoins », avance Alain Rochon, le président d’APF France handicap.

« Pire » encore, ce forfait est limité. Une heure jusqu’à 3 ans ; une demie-heure de 3 à 6 ans inclus, et plus rien ensuite… Et chaque famille n’a le droit qu’à un seul forfait, quel que soit le nombre d’enfants. C’est « loin de couvrir les besoins des parents les plus dépendants », proteste-t-il.

« Une approche opérationnelle. »

Sollicité par faire-face.fr, le cabinet de Sophie Cluzel, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, défend une « approche pragmatique, opérationnelle ». Les parents « pourront en bénéficier automatiquement sur simple présentation du certificat de naissance », avance-t-on.

Et plutôt que le nombre d’heures, « il faut regarder le montant alloué ». 900 € par mois, de 0 à 3 ans, sur la base de 30 € par heure, pour un parent en couple. Et 1 300 € s’il est seul. « C’est tout sauf négligeable. »

Dissensions au sein du CNCPH

Le cabinet a beau jeu de faire valoir que le comité de gouvernance du Conseil national consultatif des personnes handicapés (CNCPH) a donné un avis favorable au projet de décret. À rebours de la position de sa commission spécialisée sur la compensation du handicap. Celle-ci avait demandé le retrait du forfait au profit d’une évaluation individualisée.

Un forfait transitoire ?

Pour rassurer les hésitants, le secrétariat d’État s’était engagé, devant le CNCPH, à ce que la forfaitisation soit transitoire. Et à ce que, dès 2022, la PCH parentalité soit attribuée de manière individualisée.

Aujourd’hui, au cabinet, on est beaucoup moins affirmatif. «  Nous avons ajouté, dans le décret, que nous rendrons compte au CNCPH, d’ici un an de la mise en œuvre effective de l’aide à parentalité. On ajustera au besoin. Mais si la forfaitisation fonctionne bien, pourquoi serait-il nécessaire de changer ? » La fête d’anniversaire promet d’être aussi agitée que l’accouchement.

De nombreux parents exclus de l’aide

Pour l’Unafam, ce n’est pas le forfait, le cœur du problème. « Ce que nous dénonçons avant tout, c’est que l’aide à la parentalité soit réservée aux allocataires de la PCH  », précise Roselyne Touroude, sa vice-présidente. Ce qui exclut de fait de nombreux parents ayant un handicap mental, cognitif ou psychique. Car beaucoup ne sont pas éligibles à la PCH.

« Il n’y a donc pas équité d’accès à cette aide », regrette-t-elle. Au secrétariat d’État, on souligne que le sujet est à l’étude, dans sa globalité. Denis Leguay, le président de Santé mentale France, a été missionné, cette année, pour travailler sur l’adaptation effective de la PCH au handicap psychique et aux troubles du neuro-développement.

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