L’inestimable valeur monétaire du travail des aidants

Publié le 6 octobre 2023 par Emma Lepic
Il s’avère d’autant plus impossible de quantifier de façon irréfutable la valeur économique du travail des aidants que leur nombre lui-même ne fait pas consensus.

Onze milliards d’euros d’économies réalisées grâce au soutien apporté aux personnes handicapées et âgées par les aidants ? Ou même plus de 60 ? Inversement une baisse du produit intérieur brut à l’échelle nationale parce qu’ils sont moins productifs en entreprise ? La valeur monétaire des tâches gratuites accomplies par les aidants apparaît impossible à chiffrer précisément. Une lacune regrettable : la reconnaissance de ce travail à sa juste valeur inciterait les pouvoirs publics à développer des politiques publiques appropriées.

Les aidants permettraient à la société française dans son ensemble d’économiser onze milliards d’euros par an grâce à leur travail auprès des personnes en situation de handicap et âgées qu’ils soutiennent. C’est le chiffre le plus souvent annoncé. Il résulte des calculs du laboratoire d’économie et de gestion des organisations de santé de l’université Paris Dauphine. C’est lui qui gère le volet français de l’enquête Share sur la santé, le vieillissement et la retraite en Europe.

Un chiffre sous-estimé, selon Franck Guichet, sociologue, directeur du bureau d’études émiCité. Sollicité par Faireface.fr, il estime, lui, ce gain économique à 61, 7 millions d’euros (61 764 500 exactement), soit près de six fois plus.

Le soutien moral, inestimable par nature

Pour calculer ce montant, il est parti du nombre d’aidants apportant une aide à la vie quotidienne, soit, selon la Drees, l’organisme statistique du ministère des Solidarités, 5,6 millions de personnes (5 644 000 exactement). En moyenne, ces aidants consacrent 9,15 heures à l’aide donnée.

Si un professionnel de l’aide à domicile, dont le tarif horaire s’établit à 23 € devait réaliser toutes ces tâches, on arriverait à plus de 60 milliards d’euros. Et encore, tient à préciser Franck Guichet : « C’est sans compter d’autres formes d’aide, comme le soutien moral ou les aides administratives, inestimables par nature. »

Le nombre d’aidants lui-même en question

En somme, les incertitudes apparaissent trop nombreuses pour quantifier de façon irréfutable la valeur économique du travail des aidants. Leur nombre lui-même ne fait pas consensus. La Drees en compte 9,3 millions. Le chiffre de onze millions est aussi parfois avancé, issu d’un baromètre BVA de 2018. « C’est un peu comme le nombre de manifestants selon la police ou les organisateurs », s’amuse Cyril Desjeux, sociologue, directeur scientifique d’Handéo. Avant de préciser, avec sérieux cette fois, « les méthodes de calcul diffèrent ».

Autre point, selon lui : quel que soit leur nombre, les aides apportées par ces personnes demeurent sous-estimées. À titre d’exemple, il évoque les soins de santé. Mais aussi ce qu’il appelle des « aides discrètes » des jeunes aidants. Des apports indirects, quand, par exemple, un adolescent, déjà aidant par ailleurs, essaie de limiter la charge mentale d’un parent en se montrant studieux. Autant d’inconnues dans l’équation.

Aux côtés des bénéfices pour la société, des coûts ?

D’autant plus que comme les gains réalisés grâce à leur travail, le coût qu’il peut représenter pour la société est lui aussi difficile à chiffrer. Avec beaucoup de précautions, l’économiste et président de l’Institut Santé, Frédéric Bizard, risque un chiffre, sur le plan macro-économique : les aidants conduiraient à la perte de 1,5 point de produit intérieur brut, de richesse nationale. En cause : leurs frais de santé car ils ne prennent pas assez soin d’eux, une moindre productivité en entreprise, etc. Mais il précise tout de suite qu’il conviendrait de mesurer le gain social et humain de la présence des aidants, en regard. Ce qui est impossible.

Or, aux yeux de Cyril Desjeux, une meilleure connaissance de la valeur monétaire du travail des aidants permettrait d’ajuster les politiques publiques et de mieux répondre, enfin, à leurs besoins : « Si l’aide qu’ils apportent engendre des ruptures dans leur vie professionnelle, c’est que les dispositifs en place sont mal faits. »

Comment 2 commentaires

Nous sommes toujours aidant des personnes âgées et des personnes handicapées quand cela peut être utile pour ses proches et ses amis et son père paix à son âme de plus ➕ seigneur jésus christ et la gloire

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