Prothèses, orthèses, corsets… : les orthoprothésistes en butte à la tarification

Publié le 8 novembre 2023 par Élise Descamps
Les orthoprothésistes estiment que les remboursements de leurs prestations sont de véritables freins au développement de l'appareillage.

Les orthoprothésistes sont indispensables à la vie quotidienne des personnes en situation de handicap pour lesquelles ils fabriquent des appareillages sur mesure. Mais alors que l’approche des jeux Paralympiques de Paris n’a jamais rendu aussi visibles orthèses, prothèses, et diverses coques de maintien, leur organisation professionnelle confie des inquiétudes sur la tarification, pour une bonne prise en charge des patients. 

1 300 orthoprothésistes en France. 180 000 prothèses, orthèses, corsets, coques, réalisés neufs, sur mesure, chaque année. 85 000 appareillages réparés ou ajustés chaque année également.  850 000 personnes appareillées (individuels, résidents d’établissements médico-sociaux, d’Ehpad…). Un nombre en croissance, avec la hausse de l’espérance de vie, la meilleure détection des scolioses…

Le service rendu au quotidien par ces appareillages ne fait pas de doute. Mais l’Union française des orthoprothésistes (Ufop), organisation des professionnels du grand appareillage orthopédique externe sur mesure, pointe des difficultés.

Certains appareillages vendus à perte

Le premier problème posé à ces professionnels paramédicaux est conjoncturel. Celui de la hausse du prix des matériaux entrant dans la composition des appareillages (plastique, silicone…), de l’énergie, du carburant (ils se déplacent beaucoup auprès des patients)… Ils disent peiner à contenir leurs prix, alors que les plafonds de remboursement de la Sécurité sociale, eux, n’ont pas été revalorisés depuis 2017.

« Nous sommes obligés de vendre certains appareils à perte, comme les supports roulants pour corsets-sièges, remboursés moins chers que le prix auquel nous devons les acheter », pointe Jean-François Cantero, président de l’Ufop. Le risque, selon eux ? Que les orthoprothésistes abandonnent justement certains appareillages. Leur demande adressée au Gouvernement : revaloriser de 10% les tarifs réglementés en orthoprothèse.

Des nomenclatures illisibles, sources d’inégalités de prise en charge

Deuxième problème : les nomenclatures des produits remboursés , à savoir la description de leurs spécificités, matériaux, fonctions, sont très anciennes, citant des matériaux qui ne sont plus employés ou ne citant pas d’autres matériaux plus récents. Elles sont aussi rédigées de façon peu lisible, sujette à interprétations. Un casse-tête pour les médecins prescripteurs qui doivent utiliser les termes attendus par les CPAM pour déclencher les remboursements.

« Cela conduit à des inégalités de prise en charge d’une région à l’autre », estime l’Ufop. Pour elle, il est urgent de revoir cette nomenclature, d’autant plus qu’elle freine l’accès des patients à l’innovation. « Nous savons faire beaucoup de choses mais ne pouvons pas les faire car nous ne savons pas les facturer ! », regrette Gilles Vigné, orthoprothésiste.

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Peu de produits liés au parasport remboursés

Troisième problème : le non-remboursement pur et simple de toute une catégorie de produits dédiés au parasport. De la simple mais très ajustée orthèse de main pour aider à saisir une pagaie ou une raquette aux lames de courses, en passant par la coque de maintien pour canoé-kayak… : impossible de faire du sport sans appareillage.

Pourtant, derrière leur visibilité croissante se cache une réalité amère pour tous les sportifs qui ne disposent pas de sponsors : la Sécurité sociale ne les rembourse pas. Aucune lame, aucune orthèse de préhension destinée à la pratique sportive, ne figure dans la LPPR (liste des produits et prestations remboursés). « Les appareillages remboursés permettent seulement d’avoir une activité physique d’intensité très modérée, incompatibles avec une pratique sportive qui génère un effort important, au risque d’entraîner souffrances et blessures. », poursuit l’Ufop.

Résultat : cela limite grandement le développement du parasport auprès du grand public. Un paradoxe, alors que les exhortations à la pratique sportive se multiplient à mesure qu’approchent les jeux Paralympiques de Paris. Faute de remboursement, l’offre accessible se réduit aux sports pouvant être pratiqués avec des prothèses de la vie quotidienne ou sans appareillage (comme la natation).

Tendance à la fermeture des cabinets d’orthoprothésie dans les petites villes et à leur concentration dans les grandes villes, référentiel des études (BTS en trois ans) plus en phase avec les attendus de la profession, manque de médecins rendant moins accessibles les prescriptions de renouvellement… : pour tous ces sujets, la profession d’orthoprothésiste dit attendre des réponses de l’État.

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