RSA : le handicap ne dispense pas automatiquement des 15 heures d’activité obligatoires

Publié le 28 mars 2024 par Franck Seuret
En signant son contrat d'engagement réciproque, l'allocataire du RSA s'engage à effectuer une durée hebdomadaire d’activité de quinze heures qui peut prendre diverses formes : formation, ateliers, mise en situation en entreprise...

Dans les départements expérimentant déjà le RSA sous condition d’activité, le handicap ne donne pas droit de fait à une exemption de ces 15 heures obligatoires, contrairement à ce que la loi plein emploi laissait espérer. C’est avant tout la situation médicale qui entre en ligne de compte. 

Le RSA sous condition d’activité gagne du terrain. Depuis début mars, 29 départements, en plus des 18 déjà engagés dans la phase-test en 2023, expérimentent le RSA nouvelle formule avec une partie de leurs allocataires. Ces derniers doivent effectuer quinze heures par semaine de formation, d’atelier de remobilisation professionnelle, de stage en entreprise, de travail bénévole au sein d’une association … en contrepartie de l’allocation. Une mesure qui sera généralisée à l’ensemble du territoire en 2025.

Sur quels critères le handicap et l’invalidité seront-ils appréciés ?

La loi plein emploi, adoptée en octobre dernier, précise toutefois que certains allocataires pourront être « totalement exclus » des 15 heures d’activité hebdomadaire obligatoires, inscrites dans le contrat d’engagement réciproque. Il s’agit « des personnes rencontrant des difficultés particulières et avérées, en raison de leur état de santé, de leur handicap, de leur invalidité ou de leur situation de parent isolé sans solution de garde pour un enfant de moins de douze ans ».

Mais sur quels critères le handicap et l’invalidité seront-ils appréciés ? La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé suffira-t-elle ? Ou faudra-t-il justifier d’un taux d’incapacité minimum ? La loi n’en dit mot. « On risque donc d’avoir des différences d’appréciation en fonction de l’approche politique du Conseil départemental et des évaluations des équipes sociales », anticipe Carole Salères, conseillère nationale emploi d’APF France handicap.

« Le handicap ne constitue pas en lui-même un empêchement au travail »

Faire-face.fr a sollicité les départements pionniers pour savoir comment ils appliquaient ces dispositions. Conclusion : le handicap et l’invalidité ne débouchent pas automatiquement sur une dispense d’activités. « Le handicap ne constitue pas en lui-même un empêchement au travail, souligne ainsi le Conseil départemental de la Somme (80). Une personne peut avoir une RQTH et exercer un travail adapté à son handicap. »

Un rendez-vous d’évaluation pour commencer

Dans tous les départements concernés, la procédure démarre par un rendez-vous d’évaluation de la situation personnelle et professionnelle de chaque allocataire prenant part à l’expérimentation. « C’est lors de cet examen que l’orientation la plus appropriée est décidée », complète le CD 80.

Idem dans le Nord à l’issue de « l’entretien de diagnostic ». En cas de « problématique de santé et/ou de handicap, le nombre d’heures d’activités s’adapte aux possibilités de la personne ».

Un accompagnement davantage social que professionnel

Cette adaptation peut aller jusqu’à la dispense totale d’activité… en dernier recours. « Le dispositif est modulable pour s’adapter au profil de chacun, préfère mettre en avant le CD d’Ille-et-Vilaine (35) . Les personnes pour lesquelles le handicap, la santé ou des difficultés familiales constituent des freins majeurs ne sont pas mises de côté mais accompagnées avec des dispositifs adaptés à leurs besoins. » Un accompagnement qui est alors davantage social que professionnel, axé sur l’accès aux droits.

« Les premiers retours du côté du Collectif Alerte de lutte contre la pauvreté et l’exclusion semblent effectivement indiquer que certains CD sont sur une logique d’exemption avec un accompagnement tout social pour des allocataires ayant des problématiques de santé /handicap/sociales », complète Carole Salères.

Les maladies longues durée, motif d’empêchement

Mais bien plus que le handicap, c’est la santé qui est le critère déterminant. « Une exemption à l’accompagnement intensif* est possible pour les allocataires présentant de graves problématiques de santé. Nous veillons à ne pas mélanger problème de santé et handicap, insiste le CD de Loire-Atlantique (44). On peut avoir une personne avec un problème de santé empêchant son insertion mais sans handicap reconnu par la MDPH et une autre ayant une RQTH et que son handicap n’empêche absolument pas de travailler. »

Même son de cloche du côté de la Somme. Ce sont les maladies de longue durée ou nécessitant un protocole lourd et/ou régulier qui justifient « le plus souvent » des « empêchements légitimes » aux 15 heures d’activité hebdomadaire. Les proches aidants peuvent également se retrouvés empêchés, précise le CD 80.

Les proches aidants partiellement dispensés d’activités

La loi plein emploi contient en effet une autre disposition que celle concernant les travailleurs handicapés, malades ou parents isolés et qui serait, elle, applicable aux aidants.

« Pour des raisons liées à la situation individuelle de l’intéressé (…), la durée d’activité hebdomadaire peut être réduite (…) sans toutefois être nulle. » Reste à espérer que les autres départements en fassent la même lecture que le Conseil départemental de la Somme. Les aidants ont besoin de temps pour leur proches, pas de contraintes en plus.

* Trois départements expérimentateurs dont celui de Loire-Atlantique s’opposent au conditionnement du RSA aux 15 heures d’activité. Ils préfèrent parler d’accompagnement intensif ou renforcé.

Handicapées… mais au RSA

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