Les cursus des professionnels de santé oublient la poliomyélite

Publié le 24 octobre 2022 par Emma Lepic
« Seuls les spécialistes de médecine physique et de réadaptation sont formés aux conséquences de la poliomyélite », souligne Alain Yelnik, spécialiste en médecine physique et de réadaptation, aujourd'hui à la retraite.

Presque disparue des radars grâce aux campagnes de vaccination massive, la poliomyélite, maladie neuromusculaire, touche encore environ 50 000 personnes en France. Nombre d’entre elles sont vieillissantes. Elles peinent à bénéficier d’un suivi adapté, faute de professionnels de santé encore formés à ses spécificités. À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la poliomyélite, le 24 octobre, un point s’impose.

Depuis une trentaine d’années, on ne compte plus de nouveau malade atteint de poliomyélite en France. Rendue obligatoire dans l’Hexagone en 1964, la vaccination a permis de quasiment l’éradiquer. Résultat ? Elle semble appartenir au passé.

Des médecins pas ou peu formés

Éradiquée, la poliomyélite disparaît donc des cursus d’études des professionnels de santé. « Seuls les spécialistes de médecine physique et de réadaptation sont formés aux conséquences de cette maladie », souligne Alain Yelnik, professeur émérite de l’Université Paris-Cité, ancien chef de service de MPR à l’hôpital Lariboisière-Fernand-Widal, dans le 10e arrondissement de Paris.

Aujourd’hui retraité, il raconte que lui-même n’avait déjà pas bénéficié d’un enseignement détaillé de cette pathologie. Il ajoute qu’actuellement, les neurologues apprennent toujours à reconnaître les signes cliniques de la maladie. Ils peuvent ainsi la distinguer des autres causes de paralysie mais ils ne sont plus formés à ses conséquences. « Les générations de médecins qui connaissent la poliomyélite sont en voie de disparition ! » souligne Fatima Khallouk, référente jeunes polios de l’association Polio-France depuis trois ans.

Des conséquences multiples de la poliomyélite

Pourtant, cette maladie neuromusculaire possède des spécificités. « D’abord, une grande variété de situations, puisqu’elle peut être quasiment invisible ou imposer de se déplacer en fauteuil roulant », fait observer Daniel Morin, coanimateur du groupe entraide polio ouest, créé en 2013 au sein d’APF France handicap.

Ensuite, le point commun de ces patients tient à leur moyenne d’âge, relativement élevée, pour ceux qui ont contracté la poliomyélite en France. Dès lors, des phénomènes présents dans la population générale, comme l’arthrose, peuvent se manifester chez eux. Et de façon parfois exacerbée, en raison de difficultés à la marche pendant plusieurs années. « Cela se traduit par de la fatigue, des douleurs, des chutes… », liste Daniel Morin. Alain Yelnik complète ce tableau clinique en ajoutant : « Des conséquences articulaires, musculaires, respiratoires, parfois urinaires, sur le sommeil, sur l’état orthopédique… »

Des patients mal pris en charge

Aux côtés des personnes vieillissantes atteintes de la poliomyélite, de plus jeunes patients vivent en France, souvent arrivés de l’étranger, et moins bien pris en charge au cours de leurs premières années de vie. Ce qui engendre la nécessité de soins adaptés.

Sur le plan physique mais aussi psychologique, souligne Fatima Khallouk : « On nous regarde comme des extraterrestres, puisque nous sommes censés ne plus exister. Ce qui peut compliquer l’acceptation par les personnes concernées de leur maladie et de leur handicap. »

Sur le plan des soins physiques, elle remarque que nombre de demandes, qui lui sont adressées, concernent la quête de kinésithérapeutes adéquats. Avant de mentionner que l’arrivée de nouveaux jeunes publics touchés par cette maladie soulève aussi des interrogations en matière d’accès aux droits, de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) à la retraite anticipée.

Pour aller plus loin

Poliomyélite : Histoires humaines et histoire scientifique, Alain Yelnik, éd. L’Harmattan, 204 p., 22,50 €.

 

 

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Comment 1 commentaire

JE SUIS POLIO ,SUIVI PAR LE PROFESSEUR GENET . DEPUIS DIX ANS JE SUIS EN PHASE DE PERTE DE MUSCULATION ET D’AUTONOMIE . DE PLUS EN PLUS JE ME SERS DE FAUTEUIL ROULANT ELECTRIQUE CONTRE MON GRE ET PAR OBLIGATION . JE SUIS VACCINE DE LA POLIO . JE SUIS ENTIEREMENT D’ACCORD AVEC TOUS LES COMMENTAIRES QUI SONT REDIGES .
CORDIALEMENT .
MICHEL SERY

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