« L’idéal serait de fusionner les Paralympiques avec les JO »

Publié le 30 août 2021 par Florent Godard
Arnaud Assoumani a remporté cinq médailles aux jeux Paralympiques, dont une médaille d'or en saut en longueur à Pékin (2008), ou encore une de bronze, ici, à Rio (2016), dans la même discipline. © FFH / G. Picout

Déjà quatre fois médaillé paralympique en saut en longueur, Arnaud Assoumani tentera de décrocher l’or aux Jeux de Tokyo. Pour lui, l’événement offre aussi une tribune lui permettant de défendre une société plus inclusive. L’athlète appelle à un rapprochement progressif entre les jeux Olympiques et Paralympiques.

Faire-face.fr : Comment abordez-vous votre concours de saut en longueur alors que vous revenez tout juste d’une grave blessure qui vous a longtemps éloigné des pistes d’athlétisme ?

Arnaud Assoumani : En effet, l’an dernier, j’ai été victime de la plus grave blessure de ma carrière : une rupture complète d’un tendon au niveau des ischio-jambiers. Qui plus est sur ma jambe d’appui. J’ai passé quatre mois en rééducation.

Cette année, j’ai recommencé à sauter progressivement au printemps, avant de remporter le championnat de France, puis de réaliser la deuxième performance mondiale de l’année avec 7,07 mètres au meeting de Saint-Denis (93). 

F-f.fr : Quid de votre niveau de forme actuel ?
A.A : Finalement, j’arrive dans de meilleures dispositions qu’aux Jeux de 2012 et 2016. Physiquement, je me sens très bien. J’ai aussi travaillé sur la préparation et l’imagerie mentales, pour améliorer les automatismes mais aussi lever des freins potentiels. Comme l’appréhension de se blesser, quand peut avoir inconsciemment quand on reprend les sauts, par exemple.  

F-f.fr : Quel objectif visez-vous à ces jeux Paralympiques ? 

A.A : Remporter l’or. En essayant d’aller le plus loin possible, à 7,30 mètres si c’est la marque requise pour l’emporter, à 7,70 mètres s’il le faut pour dépasser mes adversaires…

« On ne parle hélas du handisport qu’une fois tous les quatre ans. »

F-f.fr : Vous souhaitez profiter de cet événement pour défendre une meilleure reconnaissance du handisport et de la différence…

A.A : Tout à fait. Ce qui me dérange notamment, c’est qu’on ne parle hélas du handisport qu’une fois tous les quatre ans, à l’occasion des Jeux. Il reste des efforts à faire côté médiatisation. C’est l’une des raisons pour laquelle je poursuis ma carrière, et que je me bats pour être présent à chaque olympiade. Malgré les sacrifices que cela suppose. Car je dispose alors d’une tribune pour être entendu.

Arnaud Assoumani,  lors des championnats de France handisport à Albi, les 12 et 13 juin 2021. © FFH / Florent Pervillé

F-f.fr : Pourquoi souhaitez-vous voir fusionner les jeux Olympiques et Paralympiques ?

A.A : Même si cela reste encore très utopique et que les contraintes sont nombreuses, c’est ce vers quoi il faut tendre. On ne crée pas une société bis pour les personnes différentes, qui ont un handicap, une religion ou une sexualité différente, etc.

En France, on vise plutôt le mélange des communautés. Et moi, je m’inscris totalement dans ces valeurs-là.

 

 

« Entre athlètes olympiques et paralympiques, on ne fait pas de différence. Quand on se croise, on parle sport. »

Entre athlètes olympiques et paralympiques, quand on se croise à l’entraînement à l’Insep ou en déplacement, on ne fait pas de différence entre nous. On parle sport : « Où en es-tu dans ta préparation? C’est quand ta prochaine compétition ?  Etc. » Les seuls moments où l’on évoque vraiment le sujet du handicap, c’est lorsqu’on parle aux médias, quand on intervient en entreprise ou à la demande des comités olympique ou paralympique français. 

« Réunir tout le monde sous une même flamme. »

F-f.fr : Pour la première fois dans l’histoire du sport français, tous les athlètes font partie de la même équipe unifiée. Qu’en pensez-vous ?

A.A : C’est une étape importante. Mais j’aimerais aussi qu’on réunisse tout le monde sous une même flamme, qui s’allumerait au début des JO, puis s’éteindrait après les Paralympiques.

Malheureusement, les athlètes ne vivent pas les Jeux comme l’événement unique qu’ils devraient être. Lors des Paralympiques, beaucoup de journalistes sont déjà partis, c’est la rentrée scolaire, il y a moins d’attention sur nous… L’adrénaline retombe. Le public en prend conscience d’ailleurs. Sur les réseaux sociaux, on voit des débats et des réactions : « Pourquoi il y a une pause de 15 jours entre les Jeux ? Et pourquoi la flamme s’éteint… ? »

« JO et Paralympiques défendent des valeurs communes, arrêtons de les dissocier. »

Encore une fois, il est tout à fait logique qu’un jour JO et Paralympiques ne soient qu’une seule et même entité. Tous deux défendent des valeurs communes, humanistes. Arrêtons de dissocier les deux. Quand je vais faire des courses le week-end, personne ne me dit : « Vous avez un handicap, vous ne pouvez pas rentrer dans ce magasin, il faut vous rendre dans un magasin spécialisé. » Dans la société, on ne sépare pas les choses, pourquoi le ferait-on dans le sport ?

Faire-face.fr : Cela pourrait-il contribuer à une société beaucoup plus inclusive ?
F-f.fr : Bien sûr ! C’est le combat que je mène, pour que ces idées obtiennent une résonance un peu plus importante. Voilà aussi pourquoi, je veux continuer à remporter de nouvelles médailles. Parce que les médailles paralympiques n’ont pas la même valeur. Donc il faut en décrocher plusieurs et surtout d’or pour avoir un impact.

* Nota bene : la finale du saut en longueur (catégorie T47) à laquelle participe Arnaud Assoumani aura lieu le mardi 31 août à 2 h 30 (heure française).

Toujours aux championnats de France d’Albi, avec l’emblématique prothèse customisée que l’athlète de 35 ans arbore lors des compétitions. © FFH /Florent Pervillé

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